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jusqu’à ses conséquences expérimentales les plus lointaines et les plus concrètes, et de traduire le résultat de ces réflexions par une série de projets précis d’expériences cruciales.

C’est là un des caractères les plus remarquables de ce grand esprit : son extraordinaire puissance de construction abstraite est équilibrée par un souci constant de la réalité ; il est réaliste en mathématiques comme il l’est en physique. L’arbre de sa pensée, ramifié à l’infini, est solidement attaché au sol par des racines profondes. Rien ne donne mieux une idée de cette puissante et robuste organisation que la lecture des articles nombreux qu’il a consacrés à la discussion des théories électromagnétiques, depuis celles que je viens de rappeler jusqu’aux plus récentes de Hertz, Larmor et Lorentz. Il atteint sans peine aucune, à travers le réseau complexe et touffu des formules, la signification physique, l’affirmation concrète, l’expérience possible. Comme dans son œuvre de pure mathématique, il voit ici la conséquence lointaine avec une déconcertante rapidité, sans passer, au moins de manière consciente, par les intermédiaires sur lesquels d’autres ont besoin de prendre appui en chemin.