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Traité ſur la Tolérance. Chap. XVIII.

les Réprouvés en horreur, que les Janſéniſtes ſont condamnés par une Bulle, qu’ainſi les Janſéniſtes ſont réprouvés, s’en vont brûler une maiſon des Pères de l’Oratoire parce que Queſnel l’Oratorien était Janſéniſte, il eſt clair qu’on ſera bien obligé de punir ces Jéſuites.

De même, s’ils ont débité des maximes coupables, ſi leur inſtitut eſt contraire aux Loix du Royaume, on ne peut s’empêcher de diſſoudre leur Compagnie, & d’abolir les Jéſuites pour en faire des Citoyens ; ce qui au fond eſt un mal imaginaire, & un bien réel pour eux : car où eſt le mal de porter un habit court au-lieu d’une ſoutane, & d’être libre au-lieu d’être eſclave ? On réforme à la paix des Régiments entiers, qui ne ſe plaignent pas : pourquoi les Jéſuites pouſſent-ils de ſi hauts cris, quand on les réforme pour avoir la paix ?

Que les Cordeliers, tranſportés d’un ſaint zèle pour la Vierge Marie, aillent démolir l’Égliſe des Jacobins, qui penſent que Marie eſt née dans le péché originel ; on ſera obligé alors de traiter les Cordeliers à peu près comme les Jéſuites.

On en dira autant des Luthériens & des Calviniſtes : ils auront beau dire, nous ſuivons les mouvements de notre conſcience, il vaut mieux obéir à Dieu qu’aux hommes ; nous ſommes le vrai troupeau, nous

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