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Salomon.

qu’on ait mis au dernier verset un mot édifiant sur Dieu, pour diminuer le scandale qu’un tel livre devait causer.

Les critiques auront de la peine à se persuader que ce livre soit de Salomon. Il n’est pas naturel qu’il ait dit : malheur à la terre qui a un Roi enfant. Les Juifs n’avaient point eu encor de tels Rois.

Il n’est pas naturel qu’il ait dit, j’observe le visage du Roi. Il est bien plus vraisemblable que l’auteur a voulu faire parler Salomon, & que par cette aliénation d’esprit dont tous les ouvrages des Juifs sont remplis, il a oublié souvent dans le corps du livre que c’était un Roi qu’il faisait parler.

Ce qui est toûjours surprenant, c’est que l’on ait consacré cet ouvrage impie parmi les livres canoniques. S’il fallait établir aujourd’hui le canon de la Bible, on n’y mettrait certainement pas l’Ecclésiaste ; mais il fut inséré dans un tems où les livres étaient très rares, où ils étaient plus admirés que lus. Tout ce qu’on peut faire aujourd’hui, c’est de pallier autant qu’il est possible l’Épicuréisme qui règne dans cet ouvrage. On a fait pour l’Ecclésiaste comme pour tant d’autres choses qui révoltent bien autrement. Elles furent établies dans des tems d’ignorance ; & on est forcé, à la honte de la raison, de les soutenir dans des tems éclairés, & d’en déguiser ou l’absurdité ou l’horreur par des allégories.

Le Cantique des Cantiques est encor attribué à Salomon, parce que le nom de roi s’y