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Antitrinitaires

ble et qu’on distingue en trois ce qui n’est point distingué en soi.

Que si on dit que les trois personnalités ne sont ni des substances différentes dans l’essence divine, ni des accidens de cette essence, on aura de la peine à se persuader qu’elles soient quelque chose.

Qu’il ne faut pas croire que les trinitaires les plus rigides & les plus décidés, aient eux-mêmes quelque idée claire de la manière dont les trois hypostases subsistent en Dieu, sans diviser sa substance & par conséquent sans la multiplier.

Que Saint Augustin lui-même, après avoir avancé sur ce sujet mille raisonnements aussi faux que ténébreux, a été forcé d’avouer qu’on ne pouvait rien dire sur cela d’intelligible.

Ils rapportent ensuite le passage de ce Père qui en effet est très singulier. « Quand on demande, dit-il, ce que c’est que les trois, le langage des hommes se trouve court, & l’on manque de termes pour les exprimer : on a pourtant dit trois personnes, non pas pour dire quelque chose ; mais parce qu’il faut parler & ne pas demeurer muet. » Dictum est tres personæ, non ut aliquid diceretur, sed ne taceretur, de trinit. Luc. V. Chap. IX.

Que les théologiens modernes n’ont pas mieux éclairci cette matière.

Que quand on leur demande ce qu’ils entendent par ce mot de personne, ils ne l’expliquent qu’en disant que c’est une certaine distinction incompréhensible, qui fait que l’on