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il ne peut en dépendre. Nous le recevons, & comment le recevons-nous ? On sait assez qu’il n’y a aucun rapport entre l’air battu, & des paroles qu’on me chante, & l’impression que ces paroles font dans mon cerveau.

Nous sommes étonnés de la pensée ; mais le sentiment est tout aussi merveilleux. Un pouvoir divin éclate dans la sensation du dernier des insectes comme dans le cerveau de Newton. Cependant, que mille animaux meurent sous vos yeux, vous n’êtes point inquiets de ce que deviendra leur faculté de sentir, quoique cette faculté soit l’ouvrage de l’Être des êtres ; vous les regardez comme des machines de la nature nées pour périr & pour faire place à d’autres.

Pourquoi & comment leur sensation subsisterait-elle, quand ils n’existent plus ? Quel besoin l’auteur de tout ce qui est, aurait-il de conserver des propriétés dont le sujet est détruit ? Il vaudrait autant dire que le pouvoir de la plante nommée sensitive, de retirer ses feuilles vers ses branches, subsiste encor quand la plante n’est plus. Vous allez sans doute demander, comment la sensation des animaux périssant avec eux, la pensée de l’homme ne périra pas ? je ne peux répondre à cette question, je n’en sais pas assez pour la résoudre. L’auteur éternel de la sensation & de la pensée sait seul comment il la donne, & comment il la conserve.

Toute l’antiquité a maintenu, que rien n’est dans notre entendement qui n’ait été dans nos sens.