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278 GUERRE.


ture entière. Que deviennent & que m’importent l’humanité, la bienfaisance, la modestie, la tempérance, la douceur, la sagesse, la piété, tandis qu’une demi-livre de plomb tirée de six cents pas me fracasse le corps, & que je meurs à vingt ans dans des tourments inexprimables, au milieu de cinq ou six mille mourants, tandis que mes yeux qui s’ouvrent pour la dernière fois voient la ville où je suis né détruite par le fer & par la flamme, & que les derniers sons qu’entendent mes oreilles sont les cris des femmes & des enfans expirant sous des ruines, le tout pour les prétendus intérêts d’un homme que nous ne connaissons pas ?

Ce qu’il y a de pis, c’est que la guerre est un fléau inévitable. Si l’on y prend garde, tous les hommes ont adoré le dieu Mars. Sabaoth chez les Juifs signifie le dieu des armes : mais Minerve chez Homère appelle Mars un dieu furieux, insensé, infernal.

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GRACE.


Sacrés consulteurs de Rome moderne, illustres & infaillibles théologiens, personne n’a plus de respect que moi pour vos divines décisions ; mais si Paul Émile, Scipion, Caton, Cicéron, César, Titus, Trajan, Marc-Aurèle, revenaient dans cette Rome qu’ils mirent autrefois en quelque crédit, vous m’avouerez