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y régnaient. Maintenant, je vous demande si une nation assemblée, qui a des loix & des princes, ne suppose pas une prodigieuse antiquité ? Songez combien de temps il faut pour qu’un concours singulier de circonstances fasse trouver le fer dans les mines, pour qu’on l’emploie à l’agriculture, pour qu’on invente la navette & tous les autres arts.

Ceux qui font les enfans à coup de plume, ont imaginé un fort plaisant calcul. Le jésuite Pétau, par une belle supputation, donne à la terre 285 ans après le déluge, cent fois plus d’habitans qu’on n’ose lui en supposer à présent. Les Cumberlands & les Whistons ont fait des calculs aussi comiques ; ces bonnes gens n’avaient qu’à consulter les registres de nos colonies en Amérique, ils auraient été bien étonnés, ils auraient appris combien peu le genre humain se multiplie, & qu’il diminue très-souvent, au lieu d’augmenter.

Laissons donc, nous qui sommes d’hier, nous descendants des Celtes, qui venons de défricher les forêts de nos contrées sauvages, laissons les Chinois & les Indiens jouir en paix de leur beau climat, & de leur antiquité. Cessons surtout d’appeler idolâtres l’empereur de la Chine, & le soubab de Dékan ; il ne faut pas être fanatique du mérite chinois ; la constitution de leur empire est à la vérité la meilleure qui soit au monde, la seule qui soit toute fondée sur le pouvoir paternel (ce qui n’empêche pas que les mandarins ne donnent force