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QUATRIÈME PARTIE

C’est au gouvernement à calmer les malheureuses disputes de l’école qui troublent la société.

 
   Oui, je l’entends souvent de votre bouche auguste,
Le premier des devoirs, sans doute, est d’être juste ;
Et le premier des biens est la paix de nos cœurs.
Comment avez-vous pu, parmi tant de docteurs,
Parmi ces différends que la dispute enfante,
Maintenir dans l’État une paix si constante ?
D’où vient que les enfants de Calvin, de Luther,
Qu’on croit, delà les monts, bâtards de Lucifer,
Le grec et le romain, l’empesé quiétiste,
Le quaker au grand chapeau, le simple anabaptiste,
Qui jamais dans leur loi n’ont pu se réunir,
Sont tous, sans disputer, d’accord pour vous bénir ?
C’est que vous êtes sage, et que vous êtes maître.
Si le dernier Valois, hélas ! avait su l’être,
Jamais un jacobin, guidé par son prieur,
De Judith et d’Aod fervent imitateur,
N’eût tenté dans Saint-Cloud sa funeste entreprise :
Mais Valois aiguisa le poignard de l’Église[1],
Ce poignard qui bientôt égorgea dans Paris,
Aux yeux de ses sujets, le plus grand des Henris.

Voilà le fruit affreux des pieuses querelles[2] :

Toutes les factions à la fin sont cruelles ;
Pour peu qu’on les soutienne, on les voit tout oser :
Pour les anéantir il les faut mépriser.

  1. Il ne faut pas entendre par ce mot l’Église catholique, mais le poignard d’un ecclésiastique, le fanatisme abominable de quelques gens d’église de ces temps-là, détesté par l’Église de tous les temps. (Note de Voltaire, 1756.)
  2. Chénier, dans sa pièce de vers intitulée la Promenade, a dit :

    Tel est le fruit amer des discordes civiles.