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POËME


SUR


LA LOI NATURELLE


(1752)


EXORDE

 
   Ô vous dont les exploits, le règne, et les ouvrages[1]
Deviendront la leçon des héros et des sages,
Qui voyez d’un même œil les caprices du sort,
Le trône et la cabane, et la vie et la mort ;
Philosophe intrépide, affermissez mon âme ;
Couvrez-moi des rayons de cette pure flamme
Qu’allume la raison, qu’éteint le préjugé.
Dans cette nuit d’erreur où le monde est plongé,
Apportons, s’il se peut, une faible lumière.
Nos premiers entretiens, notre étude première,
Étaient, je m’en souviens, Horace avec Boileau.
Vous y cherchiez le vrai, vous y goûtiez le beau ;
Quelques traits échappés d’une utile morale
Dans leurs piquants écrits brillent par intervalle :
Mais Pope approfondit ce qu’ils ont effleuré
D’un esprit plus hardi, d’un pas plus assuré,

  1. Nous savons que ce poëme, qu’on regarde comme l’un des meilleurs ouvrages de notre auteur, fut fait vers l’an 1751, chez Mme  la margrave de Bareith, sœur du roi de Prusse. Je ne sais quels pédants eurent depuis l’atrocité imbécile de le condamner.

    Ces vils tyrans de l’esprit, qui avaient alors trop de crédit, ont été punis depuis de toutes leurs insolences. (Note de Voltaire, 1773.) — Le parlement de Paris, qui, le 23 janvier 1759, avait condamné à être brûlés la Religion naturelle et autres écrits, était supprimé depuis décembre 1770 lorsque Voltaire imprima cette note. (B.)