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Sans s’alarmer des troubles de Paris.



Mais quels combats le jacobin vit rendre
Par Borgia le sixième Alexandre !
En cent tableaux il est représenté :
Là sans tiare, et d’amour transporté :
Tournant le dos, troussant sa soutanelle,
Avec Vanoze il se fait sa famille[1] ;
Un peu plus bas on voit Sa Sainteté
Qui s’attendrit pour Lucrèce sa fille.
O Léon dix ! ô sublime Paul trois !
A ce beau jeu vous passiez tous les rois ;
Mais vous cédez à mon grand Béarnois,
A ce vainqueur de la Ligue rebelle,
A mon héros plus connu mille fois
Par les plaisirs que goûta Gabrielle[2],
Que par vingt ans de travaux et d’exploits.



Bientôt on voit le plus beau des spectacles,
Ce siècle heureux, ce siècle des miracles,
Ce grand Louis, cette superbe cour
Où tous les arts sont instruits par l’Amour.
L’Amour bâtit le superbe Versailles ;
L’Amour, aux yeux des peuples éblouis,
D’un lit de fleurs fait un trône à Louis :
Malgré les cris du fier dieu des batailles,
L’Amour amène au plus beau des humains
De cette cour les rivales charmantes,
Toutes en feu, toutes impatientes :
De Mazarin la nièce aux yeux divins[3],
La généreuse et tendre la Vallière,
La Montespan plus ardente et plus fière.
L’une se livre au moment de jouir,
Et l’autre attend le moment du plaisir.



Voici le temps de l’aimable Régence,
Temps fortuné, marqué par la licence,
Où la Folie, agitant son grelot,

  1. Alexandre VI, pape, eut trois enfants de Vanoza. Lucrèce, sa fille, passa pour être sa maîtresse et celle de son frère : « Alexandri filia, sponsa, nurus. » (Note de Voltaire, 1762.) — Ces mots terminent l’épitaphe épigranimatique que Pontanus fit pour Lucrèce Borgia :
    Hic jacet in tumulo Lucretia nomine, sed re
    Thaïs, Alexandri filia, sponsa, nurus. (R.)
  2. La fameuse Gabrielle d'Estrées, duchesse de Beaufort. (Note de Voltaire, 1762.)
  3. Celle qui depuis fut la connétable Colonne. (Id., 1762.)