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CHANT X





Argument.- Agnès Sorel poursuivie par l’aumônier de Jean Chandos. Regrets de son amant, etc. Ce qui advint à la belle Agnès dans un couvent.






Eh quoi ! toujours clouer une préface
A tous mes chants ! la morale me lasse ;
Un simple fait conté naïvement,
Ne contenant que la vérité pure,
Narré succinct, sans frivole ornement,
Point trop d’esprit, aucun raffinement,
Voilà de quoi désarmer la censure.
Allons au fait, lecteur, tout rondement,
C’est mon avis. Tableau d’après nature,
S’il est bien fait, n’a besoin de bordure.



Le bon roi Charle, allant vers Orléans,
Enflait le cœur de ses fiers combattants,
Les remplissait de joie et d’espérance,
Et relevait le destin de la France.
Il ne parlait que d’aller aux combats,
Il étalait une fière allégresse ;
Mais en secret il soupirait tout bas,
Car il était absent de sa maîtresse.
L’avoir laissée, avoir pu seulement
De son Agnès s’écarter un moment
C’était un trait d’une vertu suprême,
C’était quitter la moitié de soi-même.



Lorsqu’il se fut au logis renfermé,
Et qu’en son cœur il eut un peu calmé
L’emportement du démon de la gloire,
L’autre démon qui préside à l’amour
Vint à ses sens s’expliquer à son tour ;