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LE TEMPLE DU GOUT. 573

Qui cliO([uaienl un peu la justesse, Mais respiraient la passion.

La Fare *, avec plus de mollesse, En baissant sa lyre d'un ton, Chantait auprès de sa maîtresse Quelques vers sans précision, Que le plaisir et la paresse Dictaient sans l'aide d'Apollon. Auprès d'eux le vif Haniilton ^, Toujours armé d'un trait qui blesse, Médisait de l'iiumaine espèce, Et même d'un peu mieux, dit-on.

L'aisé, le tiMidre Saint-Aulaire ^, Plus vieux eiicor qu'Anacréon, Avait une voix plus légère; On voyait les fleurs de Cythère Et celles du sacré vallon Orner sa tête octoirénaire.

��Déjà venaient frappor mes oreilles timides

Les affreux cris du chien de l'empire des morts.

Le moment d'après il fait le portrait d'un confesseur, ot parle du Dieu d'Israël.

Lorsqu'au bord de mon lit une voix menaçante. Des volontés du ciel interprète lassante...

Voilà bien le confesseur. Dans une autre pièce sur la Divinité, il dit :

D'un Dieu, moteur de tout, j'adore l'existence : Ainsi l'on doit passLT avec tranquillité Les ans que nous départ Varcwjle destinée.

Ces remarques sont exactes, et M. de Saint-Marc s'est trompe en disant dans son édition de Cliaulieu qu'elles ne l'étaient pas. On trouve dans ses poésies beau- coup de contradictions pareilles. 11 n'y a pas trois pièces écrites avec une correc- tion continue; mais les beautés de sentiment et d'imagination qui y sont répandues en rachètent les défauts.

L'abbé de Chaufieu mourut en 17-0, âgé de près de quatre-vingts ans, avec beaucoup de courage d'esprit. [Note de Voltaire, 1733.)

1. Le marquis de La Fare, auteur des mémoires qui portent son nom, et de quelques pièces de poésie qui respirent la douceur de ses mœurs, était plus aimable liommc qu'aimable poète. Il est mort en 1718. Ses poésies sont imprimées à la suite des œuvres de l'abbé de Chaulieu, son intime ami (Id., 1733), avec une ])réfaco très-partiaie et pleine de défauts. (Id., 1730.) — 'l'outcs les éditions du Temple du Goût, depuis 1733 jusqu'en 1817, portent ici 1718. Je me suis permis le premier, et peut-être ai-je eu tort, de mettre 1713, non que cette date soit la véritable date de la mort de La Fare, mais parce que c'est celle que Voltaire a mise dans son Siècle de Louis XIV; c'était corriger Voltaire par lui-même. La Fare est mort en 1712. (B.)

2. Le comte Antoine Hamilton, né à Caen en Normandie, a fait des vers pleins de feu et de légèreté. Il était fort satirique. [Note de Voltaire, 1739.)

3. M. de Saint-.\ulaire, à l'âge de plus de quatre-vingt-dix ans, élisait encore des chansons aimables. {Id., 1742.)

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