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Les bergers, pleins d’effroi, dans les bois se cachèrent ;
Et leurs tristes moitiés, compagnes de leurs pas,
Emportent leurs enfants gémissants dans leurs bras.
Habitants malheureux de ces bords pleins de charmes,
Du moins à votre roi n’imputez point vos larmes ;
S’il cherche les combats, c’est pour donner la paix :
Peuples, sa main sur vous répandra ses bienfaits :
Il veut finir vos maux, il vous plaint, il vous aime,
Et dans ce jour affreux il combat pour vous-même.
Les moments lui sont chers, il court dans tous les rangs
Sur un coursier fougueux plus léger que les vents,
Qui, fier de son fardeau, du pied frappant la terre,
Appelle les dangers, et respire la guerre[1].
On voyait près de lui briller tous ces guerriers,
Compagnons de sa gloire et ceints de ses lauriers :
D’Aumont[2], qui sous cinq rois avait porté les armes ;

  1. On lit dans Job, chap. xxxix : « Terram ungula fodit; exultat audacter, in occursum pergit armatis, contemnit pavorom, nec cedit gladio... Ubi audicrit buccinam, dicit :Wah; procul odoratur bellum, exhortationem ducum et ululatum
    exercitus, etc. »

    Sarrasin, dans l’Ode de Calliope sur la bataille de Lens (20 août l648), avait imité ce passage :
    Il monte un cheval superbe
    Qui, furieux aux combats,
    A peine fait courber l'herbe
    Sous la trace de ses pas ;
    Son œil est ardent, farouche;
    L'écume sort de sa bouche;
    Prêt au moindre mouvement,
    Il frappe du pied la terre,
    Et semble appeler la guerre
    Par un fier hennissement.

    Fréron (Année littéraire, 1770, VII, 335) prétend que Voltaire est le plagiaire de Sarrasin. On a aussi rappelé ce vers de Segrais :
    Son cheval, glorieux du fardeau qu'il emporte.

    Les vers de Voltaire sont une imitation de ceux de Virgile (Géorgiques, III, 79, 85, 87, 88 ) :
    Nec vanos horret strepitus · · · · · · · · · · · · · · · · · · · ·
    · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · ·
    Collectumque premens volvit sub naribus ignem.
    · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · ·
    · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · Cavatque
    Tellurem.

    Voyez aussi la note 6 de la page 205.
  2. Jean d'Aumont, maréchal de France, qui fit des merveilles à la bataille d'Ivry, était fils de Pierre d'Aumont, gentilhomme de la chambre, et de Françoise de Sully, héritière de l'ancienne maison de Sully. Il servit sous les rois Henri II, François II, Charles IX Henri III, et Henri IV. (Note de Voltaire, 1730.)