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ACTE I, SCÈNE V. 351

MARAUDIN.

Votre frère ne me doniiail (lue dix mille francs pour lui ])rocurer co mariaire. Je vous aime au moins une fois plus (pie lui ; faites-moi un billet de vingt mille francs, et je vous fais épouser la fille du baron. (Le chevalier

retire sa moin, et s’éloigne à l’extrême gauche.) Ce que je demande, au lestC, n’est

que pour l’honneur. Il est de la dignité d’un homme de votre maison d’être libéi’al cpiand il peut l’être. L’honneur me [wignarde, voyez-vous.

LE CIlEVALlIiR.

Oh ! oui, c’est votre cruel ennemi !

MARAUDIN.

Votre frère aîné est un fat.

LE CHEVALIER.

D’accord.

Jl A R A U D I N.

Un suffisant pétri de cette vanité qui n^est ([ue le partage des sots.

LE CHEVALIER.

J’en conviens.

MARAUDIN.

Un sot à berner sur le théâtre.

LE CHEVALIER.

Il est vrai.

MARAUDIN.

Un mauvais cœur dans un corps ridicule.

LE CHEVALIER.

C’est ce que je pense.

MARAUDIN.

Un petit-maître suranné qui n’a pas même le jargon de l’esprit ; un original enflé de fadaise et de vent, dont Pasquin ne voudrait pas pour son valet, s’il pouvait en avoir.

PASQUIN.

Assurément, j’aimerais bien mieux son frère le chevalier.

LE CHEVALIER.

Eh !

JI A R A u D I N.

Un homme, enfin, dont vous ne tirerez jamais rien, qui dépenserait cin- (juante mille fi’ancs en chiens et en chevaux, et qui laisserait périr son frère de misère.

LE CHEVALIER.

Cela n’est que trop vrai.

MARAUDIN.

Et vous vous feriez scrupule de supplanter un pareil homme ! et vous ne goûteriez pas une joie pai-faite en lui escroquant légitimement les cinq cent mille livres qu’il croit déjà tenir, mais qu’il mérite si peu ! et vous ne ririez pas de tout votre cœur en tenant ce soir entre vos bras la fille du baron ! et vous balanceriez à me faire (pour l’honneur) un petit billet de vingt mille francs par corps à prendre sur les plus clairs deniers de M"’de la