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qui l’ai mis à la mode ; c’est ma réputation qui vous attire du monde.

FABRICE.

Plaisante réputation ! celle d’un espion, d’un malhonnête homme (pardonnez si je répète ce qu’on dit), et d’un mauvais auteur !

FRÉLON.

Monsieur Fabrice, monsieur Fabrice, arrêtez, s’il vous plaît : on peut attaquer mes mœurs ; mais pour ma réputation d’auteur, je ne le souffrirai jamais.

FABRICE.

Laissez là vos écrits : savez-vous bien, puisqu’il faut tout vous dire, que vous êtes soupçonné d’avoir voulu perdre Mlle  Lindane ?

FREEPORT.

Si je le croyais, je le noierais de mes mains, quoique je ne sois pas méchant.

FABRICE.

On prétend que c’est vous qui l’avez accusée d’être Écossaise, et qui avez aussi accusé ce brave gentilhomme de là-haut d’être Écossais.

FRÉLON.

Eh bien ! quel mal y a-t-il à être de son pays ?

FABRICE.

On ajoute que vous avez eu plusieurs conférences avec les gens de cette dame si colère qui est venue ici, et avec ceux de ce milord qui n’y vient plus ; que vous redites tout, que vous envenimez tout.

FREEPORT, à Frélon.

Seriez-vous un mauvais sujet, en effet ? Je ne les aime pas, au moins.

FABRICE.

Ah ! Dieu merci, je crois que j’aperçois enfin notre milord.

FREEPORT.

Un milord ! adieu. Je n’aime pas plus les grands seigneurs que les mauvais écrivains.

FABRICE.

Celui-ci n’est pas un grand seigneur comme un autre.

FREEPORT.

Ou comme un autre, ou différent d’un autre, n’importe. Je ne me gêne jamais, et je sors. Mon ami, je ne sais ; il me revient toujours dans la tête une idée de notre jeune Écossaise : je