rébellion, vengez le ciel et la terre. Je sors. Redoutez la colère des dieux, si Socrate reste en vie.
Je ne veux point me brouiller avec Anitus, c’est un homme trop à craindre. S’il ne s’agissait que des dieux, encore passe.
Entre nous, Socrate a raison ; mais il a tort d’avoir raison si publiquement. Je ne fais pas plus de cas de Cérès et de Neptune que lui ; mais il ne devait pas dire devant tout l’aréopage ce qu’il ne faut dire qu’à l’oreille. Où est le mal, après tout, d’empoisonner un philosophe, surtout quand il est laid et vieux ?
S’il y a de l’injustice à condamner Socrate, c’est l’affaire d’Anitus, ce n’est pas la mienne ; je mets tout sur sa conscience ; d’ailleurs il est tard, on perd son temps. À la mort, à la mort, et qu’on n’en parle plus.
On dit qu’il est hérétique et athée ; à la mort, à la mort.
Qu’on appelle Socrate. (On l’amène.) Les dieux soient bénis, la pluralité est pour la mort. Socrate, les dieux vous condamnent, par notre bouche, à boire de la ciguë tant que mort s’ensuive.
Nous sommes tous mortels ; la nature vous condamne à mourir tous dans peu de temps, et probablement vous aurez tous une fin plus triste que la mienne. Les maladies qui amènent le trépas sont plus douloureuses qu’un gobelet de ciguë. Au reste, je dois des éloges aux juges qui ont opiné en faveur de l’innocence ; je ne dois aux autres que ma pitié.
Certainement cet homme-là méritait une pension de l’état au lieu d’un gobelet de ciguë.
Cela est vrai ; mais aussi de quoi s’avisait-il de se brouiller avec un prêtre de Cérès ?
Je suis bien aise, après tout, de faire mourir un philosophe : ces gens-là ont une certaine fierté dans l’esprit, qu’il est bon de mater un peu.
Messieurs, un petit mot : ne ferions-nous pas bien, tandis que