Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome5.djvu/385

Cette page n’a pas encore été corrigée


Scène VII.

Socrate, Xantippe, Aglaé, Sophronime.
XANTIPPE.

Allons, allons, ma fille, ne vous amusez point aux visions de mon mari ; la philosophie est fort bonne, quand on est à son aise ; mais vous n’avez rien ; il faut vivre : vous philosopherez après. J’ai conclu votre mariage avec Anitus, digne prêtre, homme puissant, homme de crédit : venez, suivez-moi ; il ne faut ni lenteur ni contradiction ; j’aime qu’on m’obéisse, et vite ; c’est pour votre bien : ne raisonnez pas, et suivez-moi.

SOPHRONIME.

Ah ciel ! Ah ! Chère Aglaé !

SOCRATE.

Laissez-la dire, et fiez-vous à moi de votre bonheur.

XANTIPPE.

Comment, qu’on me laisse dire ? Vraiment, je le prétends bien, et surtout qu’on me laisse faire. C’est bien à vous, avec votre sagesse et votre démon familier, et votre ironie, et toutes vos fadaises qui ne sont bonnes à rien, à vous mêler de marier des filles ! Vous êtes un bonhomme, mais vous n’entendez rien aux affaires de ce monde, et vous êtes trop heureux que je vous gouverne. Allons, Aglaé, venez, que je vous établisse. Et vous, qui restez là tout étonné, j’ai aussi votre affaire : Drixa est votre fait : vous me remercierez tous deux, tout sera conclu dans la minute ; je suis expéditive, ne perdons point de temps : tout cela devrait déjà être terminé.

SOCRATE.

Ne la cabrez pas, mes enfants ; marquez-lui toute sorte de déférences ; il faut lui complaire, puisqu’on ne peut la corriger. C’est le triomphe de la raison de bien vivre avec les gens qui n’en ont pas.