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292 AVERTISSEMENT.

« sans \i\ùv nia maison (Miticn-, (|ui se coiiiposail de trois cents itorsoniios ; ji ; « vais te |)on(lio aiijourd’luii pour veniier les injures de ma famille. »

On voit que la ressemblance entre ce drame et celui de Voltaire, où l’Orphelin ne paraît pas, est assez lointaine. On cite encore comme ayant servi au poëte tragique un roman anglais intitulé Oronoko, (|ue Lal)lace a traduit en français et dont Saint-Lambert a donné une imitation sous le nom de Ziindo.

Lorsque Voltaire remit le manuscrit à l.ekain.il lui fit ces recommandations : « Mon ami, vous avez les indexions de la voix naturellement douces ; i, rardez-vous bien d’en laisser échapper quelques-unes dans le rcMe deGengis. Fl faut bien vous mettre dans la tète que j’ai voulu peindre un tigre (lui, en caressant sa femelle, lui enfonce ses griffes dans les reins. »

L’Orphelin de la Chine fut représenté aux Délices, près de Genève, avant de-paraître à Paris. L’acteur qui jouait le rôle de Gengis-kan étant quelquefoffe t aînant et monotone, en entendait l’auteur gémir : « Frère Gengi^ !

frère Gengis ! »

Le président de Montesquieu, qui était s|.ectaleur, s’endormit profondément. Voltaire lui jeta son chapeau à la tète, en disant : « 11 croit être à l’audience ! »

L’Orphelin de la Chine fut représenté par les Couu’diens fi-ançais le 20 août ’1700, et fut applaudi d’un bout à l’autre. M" Clairon, qui jouait Idamé, atteignit dans cette pièce le point de perfection auquel l’art pouvait porter’son talent. La célèbre actrice, (pii depuis longtemps méditait avec Lekain la réforme du costume, eut le bon goût et le courage de renoncer aux paniers, et de paraître vêtue comme l’exigeait son rôle.

Lekain, le premier soir, fut au-dessous de lui-même, mais se releva aux représentations suivantes. M""’ Denis écrivait des Délices à d’Ârgental, le 9 septembre 1735 : « Mon oncle a reçu aujourd’hui une leUre de. M. Lekain dont il est enchanté. Il lui avoue qu’il a mal joué la première fois, et qu’il joue bien actuellement. Toutes les lettres que nous rece.’ons le confirment. J’étais bien sûre de lui, et je ne doute pas qu’il ne fasse sentir à merveille tous les contrastes du rôle. C’est le meilleur garcoïi du monde, et tout plein de talent. Je me flatte que vous aimez à ! a folie M"" Clairon ; je suis sûre (jue vous et moi nous pensons de même quand je dis h mon oncle que, p >va- avoir un grand succès, il faut de grands rôles de femmes. Il commence a être de cet avis, et est bien résolu de faire de beaux rôles à M"’ Clairon. » L’Orphelin de la Chine eut, dans sa nouveauté, seize représentations. Il fut joué à Fontainebleau, et al)plaudi par la cour comme il l’avait été par la ville. On sait qu’avant Voltaire, Pierre Corneille avait songé à placer l’action d’une de ses tragédies en Chine. L’Orphelin de la Chine n’en est pas moins la première pièce dont l’empire du Milieu ait enrichi nolie littérature.

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