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Tantôt Catilina, tantôt Rome l’emporte.
Il marche au Quirinal, il s’avance à la porte ;
Et là, sur des amas de mourants et de morts,
Ayant fait à mes yeux d’incroyables efforts,
Il se fraie un passage, il vole à son armée.
J’ai peine à rassurer Rome entière alarmée.
Antoine, qui s’oppose au fier Catilina,
A tous ces vétérans aguerris sous Sylla,
Antoine, que poursuit notre mauvais génie,
Par un coup imprévu voit sa force affaiblie ;
Et son corps accablé, désormais sans vigueur,
Sert mal en ces moments les soins de son grand cœur ;
Pétréius étonné, vainement le seconde.
Ainsi de tous côtés la maîtrese du monde,
Assiégée au-dehors, embrasée au-dedans,
Est cent fois en un jour à ses derniers moments.

CRASSUS

Que fait César ?

CICERON

Il a, dans ce jour mémorable,
Déployé, je l’avoue, un courage indomptable ;
Mais Rome exigeait plus d’un cœur tel que le sien.
Il n’est pas criminel, il n’est pas citoyen.
Je l’ai vu dissiper les plus hardis rebelles ;
Mais bientôt, ménageant des Romains infidèles,
Il s’efforçait de plaire aux esprits égarés,
Aux peuples, aux soldats, et même aux conjurés ;
Dans le péril horrible où Rome était en proie,
Son front laissait briller une secrète joie :
Sa voix, d’un peuple entier sollicitant l’amour,
Semblait inviter Rome à le servir un jour.
D’un trop coupable sang sa main était avare.

CATON

Je vois avec horreur tout ce qu’il nous prépare.
Je le redis encore, et veux le publier,
De César en tout temps il faut se défier.