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CICERON.

Du sénat ?

CATON.

Enivré de sa grandeur suprême,
Dans ses divisions il se forge des fers.

CICERON.

Les vices des Romains ont vengé l’univers,
La vertu disparaît, la liberté chancelle ;
Mais Rome a des Catons, j’espère encor pour elle.

CATON.

Ah ! qui sert son pays sert souvent un ingrat.
Votre mérite même irrite le sénat ;
Il voit d’un œil jaloux cet éclat qui l’offense.

CICERON.

Les regards de Caton seront ma récompense.
Au torrent de mon siècle, à son iniquité,
J’oppose ton suffrage et la postérité.
Faisons notre devoir : les dieux feront le reste.

CATON.

Eh ! comment résister à ce torrent funeste,
Quand je vois dans ce temple, aux vertus élevé,
L’infâme trahison marcher le front levé ?
Croit-on que Mallius, cet indigne rebelle,
Ce tribun des soldats, subalterne infidèle,
De la guerre civile arborât l’étendard ;
Qu’il osât s’avancer vers ce sacré rempart,
Qu’il eût pu fomenter ces ligues menaçantes,
S’il n’était soutenu par des mains plus puissantes,
Si quelque rejeton de nos derniers tyrans
N’allumait en secret des feux plus dévorants ?
Les premiers du sénat nous trahissent peut-être ;
Des cendres de Sylla les tyrans vont renaître.
César fut le premier que mon cœur soupçonna.
Oui, j’accuse César.

CICERON.

Et moi, Catilina !
De brigues, de complots, de nouveautés avide,
Vaste dans ses projets, impétueux, perfide,
Plus que César encor je le crois dangereux,
Beaucoup plus téméraire, et bien moins généreux,
Je viens de lui parler ; j’ai vu sur son visage,
J’ai vu dans ses discours son audace et sa rage,