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ACTE II, SCÈNE VU. M ?

C’est Orestc, sans doute ; il en est seul capable ; C’est lui, le ciel l’envoie ; il m’en daigne avertir. C’est l’éclair qui paraît, la foudre va partir.

ELECTRE,

Je vous crois ; j’attends tout ; mais n’est-ce point un piège

Que tend de mon tyran la fourbe sacrilège ?

Allons : de mon bonheur il me faut assurer.

Ces étrangers… Courons ; mon cœur va m’éclairer.

IPHISE.

Pammène m’avertit, Pammène nous conjure De ne point approcher de sa retraite obscure. Il y va de ses jours.

ELECTRE.

Ah ! que m’avez-vous dit * ? Non ; vous êtes trompée, et le ciel nous trahit. Mon frère, après seize ans, rendu dans sa patrie, Eût volé dans les bras qui sauvèrent sa vie ; Il eût porté la joie à ce cœur désolé ; Loin de vous fuir, Iphise, il vous aurait parlé. Ce fer vous rassurait, et j’en suis alarmée. Une mère cruelle est trop bien informée. J’ai cru voir, et j’ai vu dans ses yeux interdits Le barbare plaisir d’avoir perdu son fils. N’importe, je conserve un reste d’espérance : Ne m’abandonnez pas, ô dieux de la vengeance ! Pammène à mes transports pourra-t-il résister ? Il faut qu’il parle : allons, rien ne peut m’arrêter.

IPHISE,

Vous vous perdez ; songez qu’un maître impitoyable Nous obsède, nous suit d’un œil inévitable. 8i mon frère est venu, nous Talions découvrir ; Ma sœur, en lui parlant, nous le faisons périr : Et si ce n’est pas lui, notre recherche vaine Irrite nos tyrans, met en danger Pammène. Je revole au tombeau que je puis honorer : Clytemnestre du moins m’a permis d’y pleurer. Cet étranger, ma sœur, y peut paraître encore ;

1. Voltaire écrit à M" Clairon : « Si vous aviez le quart de la docilité dont je fais gloire… quand Iphise vous dit ; Pammène nous conjure, etc., vous lui répondriez, non pas avec un ton ordinaire, mais avec tous les syniptùnies du découragement, après un Ahf très-douloureux : Ah !… que m’avez-vous ditl etc. » Voyez Correspondance, 1750.

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