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ANNÉE 1766.

ment intéressé pendant cinq actes, et c’est là le grand point. J’avoue que, si je ne consultais que mon goût, je ferais grâce à l’impératrice, et elle vivrait pour nourrir son petit. Ma raison est que, si elle a la perte de son enfant à pleurer, elle n’a plus de larmes pour Rome.

Allez à Paris ; vous y serez heureux, puisque madame votre sœur[1] y va. Tout Ferney s’intéresse bien vivement à vos progrès et à votre bonheur.


6324. — À M. LE MARQUIS DE VILLEVIEILLE[2].
À Ferney, 26 avril.

Je n’ai reçu qu’aujourd’hui, monsieur, la lettre dont vous m’avez honoré, du 28 mars. J’étais trop malade pour jouir des talents de la personne que vous avez bien voulu m’annoncer. Je vous supplie de vouloir bien engager le libraire à m’envoyer trois exemplaires du livre de Fréret[3] qu’il imprime. Il n’aurait qu’à les adresser au premier secrétaire de l’intendance de Franche-Comté, avec un petit mot par lequel ce secrétaire serait supplié de me faire tenir le paquet incessamment. C’est un ouvrage que j’attends depuis longtemps avec la plus vive impatience. Il est bon qu’il en paraisse souvent de cette nature : le monde est plein de pestiférés qui ont besoin de contre-poison, et il y a des médecins qui doivent faire une collection de tous les remèdes. Il y a des apothicaires qui les distribuent, et, en qualité d’apothicaire, je saurai où placer mes trois exemplaires. Le libraire n’aura qu’à me mander comment il veut que je lui fasse tenir son argent, et il sera payé avec ponctualité.

Je vous demande bien pardon de la liberté que je prends ; mais je vous crois bon médecin, et j’implore vos bontés pour l’apothicaire, qui est votre très-humble et très-obéissant serviteur.


6325. — À M. DAMILAVILLE.
28 avril.

J’étais donc bien mal informé, mon cher ami, et je n’ai eu qu’une joie courte. On m’avait assuré que le grand livre paraissait, et vous m’apprenez qu’on m’a trompé. Par quelle fatalité

  1. Chabanon était venu chez sa sœur, voisine de Voltaire.
  2. Éditeurs, de Cayrol et François.
  3. l’Examen critique, publié par Levesque de Burigny sous le nom de Fréret.