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La dédicace que vous voulez bien m’en faire m’est très-honorable ; mais, en me dressant ce petit autel, je vous prie d’y brûler en sacrifice votre Zulime et votre Droit du Seigneur, que vous avez imprimés sous mon nom, et qui ne sont point du tout mon ouvrage. Vous avez été trompé par ceux qui vous ont donné les manuscrits, et cela n’arrive que trop souvent ; c’est le moindre des inconvénients de la littérature.

Quant aux souscriptions pour le Corneille, arrangez-vous avec l’éditeur de Genève ; je ne me suis mêlé que de commenter et de souscrire : tout ce que je sais, c’est que l’édition est finie. J’ai fait mes commentaires avec une entière impartialité, sachant bien que les belles pièces de Corneille n’ont pas besoin de louanges, et ses fautes ne font aucun tort à ce qu’il a de sublime.

On m’a envoyé de Paris un conte intitulé Ce qui plaît aux Dames. J’y ai trouvé remormora pour remémora, frange pour fange, une rime oubliée[1], et d’autres fautes ; je ne crois pas que l’imprimeur s’appelle Robert Estienne.

Je suis, de tout mon cœur, monsieur, votre très-humble, etc.


5505. — À M.  LE COMTE D’ARGENTAL[2].
4 janvier 1764.

Je n’envoie point de nouveaux contes à mes anges, sans savoir auparavant si les Trois Manières ont trouvé grâce devant leurs yeux. Je suis bien fâché qu’on ait imprimé Ce qui plaît aux Dames et l’Éducation des Filles ; c’est faner de petites fleurs qui ne sont agréables que quand on ne les vend pas au marché.

Je ne leur dis rien des roués, je ne leur dis rien d’Olympie la religieuse, parce que c’est à eux à tout dire, à tout faire, à me conduire, à me donner leurs ordres.

Je ne dis rien de la Gazette littéraire par la même raison. Oserai-je prendre la liberté de leur adresser et de mettre sous leur protection ce petit paquet pour le bonhomme Corneille[3] ? Je me flatte qu’avant qu’il soit un mois l’édition cornélienne paraîtra dans Paris. Il y aura des clabauderies ; mais je suis endurci à la fatigue.

  1. On avait omis le vers :

    S’étudiait à charmer son ennui.


    Je l’ai rétabli on 1817. (B.)
  2. Éditenr, de Cayrol et François.
  3. Le père de Marie Corneille.