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les jours. J’ai vu depuis peu des officiers et des magistrats qui ne sont point du tout welches, et j’ai béni Dieu. Entretenons le feu sacré.

Je vous salue, je vous embrasse en esprit et en vérité : je m’unis à vous plus que jamais dans la sainte tolérance. Écr. l’inf…


5990. — À M.  DAMILAVILLE.
17 avril.

Je réponds à votre lettre du 10 ; si elle avait été du 11, vous auriez été dans un bel enthousiasme des trente-six mille livres[1] accordées par le roi à notre famille Galas. Si le roi savait combien on le bénit dans les pays étrangers, il trouverait que jamais personne n’a mis son argent à un pareil intérêt. Jamais l’innocence n’a été mieux vengée ni plus honorée. Vous êtes assurément bien payé, mon cher frère, de toutes vos peines. Le généreux Élie doit être bien content : on regarde ici son Mémoire comme un chef-d’œuvre : il était impossible que les juges résistassent à la force de son éloquence. J’ai oublié tous mes maux, quand j’ai appris la libéralité du roi ; je me suis cru jeune et vigoureux, et j’imagine qu’à présent vous ne portez plus d’emplâtre au cou.

Ou je suis bien trompé, ou M. de Beaumont a dû voir l’arrêt du parlement de Toulouse à la suite de la sentence de Castres. Élie va donc, une seconde fois, tirer la vertu du sein de l’opprobre et de l’infortune. Je vous prie de l’embrasser bien tendrement pour moi, et de lui dire qu’il a un autel dans mon cœur.

Les Bazin de Hollande n’étaient pas encore arrivés quand M. de La Haye partit avec les Caloyers[2] : ces Caloyers m’ont paru fort augmentés, et capables de faire beaucoup de bien. Vous avez une petite liste[3] de personnes auxquelles on peut en envoyer, et vous trouverez sans doute quelque adepte qui se chargera aisément du reste. Les Bazin sont d’un genre tout différent :

  1. Le Journal encyclopédique du 15 avril 1765, page 171, dit que, dans les 36,000 livres, il y en eut 12,000 pour Mme  veuve Calas, 6,000 pour chacune des deux demoiselles Calas, 3,000 pour le fils, et 3,000 pour la servante. Dupleix de Bacquencourt, maître des requêtes, rapporteur du procès, se rendit chez Mme  Calas, et lui remit en outre une somme considérable en or. Cette dame pria le magistrat de vouloir bien lui dire à qui elle en avait l’obligation. « Je suis chargé, a-t-il répondu, madame, de vous demander comme grâce de ne point prendre la peine de vous en informer. »
  2. Catéchisme de l’Honnête Homme, voyez tome XXIV, page 523.
  3. Voyez la lettre du 1er avril, n° 5970.