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5950. — À M. DAMILAVILLE[1].
Mars.

Mon cher frère, votre belle âme et celle de votre digne ami M. de Beaumont veulent donc tirer de l’abîme les Sirven, comme elles en ont tiré les Calas. Voici le mémoire des Sirven, avec la copie des pièces. Il faudra dresser une statue à M. de Beaumont, avec le fanatisme et la calomnie sous les pieds. Il faut que j’aie votre portrait pour le mettre dans ce groupe.

J’ai reçu la lettre imprimée ; les gens de bien doivent en être contents, et par conséquent les dents des fripons doivent grincer.

Mes bras s’étendent à cent lieues pour vous embrasser, et mon cœur se joint au vôtre.


5951. — À M. TRONCHIN DE LYON[2].
Ferney, 20 mars 1765.

Il viendra dans quelque temps un jeune homme nommé M. de La Harpe, à qui je vous supplierai de vouloir bien donner pour moi quatre louis d’or pour l’aider à faire son voyage de Lyon à Genève. Je vous serai très-obligé.

Je vous avoue que je n’ai de ma vie goûté une joie plus pure qu’en embrassant le petit Calas[3], qui est à Genève, lorsque nous reçûmes en même temps la nouvelle de la plus ample justice qu’on ait encore faite en France à l’innocence opprimée. Ce grand exemple rognera pour longtemps les griffes affreuses du fanatisme, et fera taire sa voix infernale.

Je viens de consommer la rétrocession des Délices, et je mets l’argent qui en revient à bâtir deux ailes au château de Ferney et à faire quelques embellissements. Vous m’avouerez qu’à mon âge il est plus convenable d’augmenter et d’orner Ferney, que j’ai donné à ma nièce, que de dépenser cet argent aux Délices qui ne lui appartiendront pas.

  1. Éditeurs, de Cayrol et François. — Cette lettre, qu’on avait datée du 12 mars, ne peut être antérieure à celle du 15, où Voltaire annonce qu’il va écrire le Mémoire de Sirven, et où il conseille d’imprimer la lettre à Damilaville dont il est parlé ici.
  2. Éditeurs, de Cayrol et François.
  3. Donat Calas.