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que Marc-Michel Rey, imprimeur de Jean-Jacques, a eu l’abominable impudence de mettre sous mon nom[1] le Jean Meslier, ouvrage connu de tout Paris pour être de ce pauvre prêtre ; le Sermon des Cinquante, de La Mettrie ; l’Examen de la Religion, attribué à Saint-Évremont, etc. ? Tout a été incendié à la Haye, avec le Portatif ; voilà une bombe à laquelle on ne s’attendait point.

Je prends toutes les mesures nécessaires pour détruire tant de calomnies ; mais j’ai grand’peur qu’Omer ne se réveille au bruit de la bombe. Il serait triste qu’on vînt m’enfumer dans mon terrier à l’âge de soixante-onze ans. Mme Denis, ma nièce, a écrit à d’Hornoy, son neveu, conseiller au parlement, et lui a insinué d’elle-même qu’il devait aller, si cela était nécessaire, parler à Omer au palais, et lui dire que, s’il fait une sottise, il ne doit pas au moins me nommer dans sa sottise ; qu’il offenserait sans raison une famille nombreuse qui sert le roi dans la robe et dans l’épée ; qu’il est sûr que le Portatif n’est point de moi, et que cet ouvrage est d’une société de gens de lettres très-connus dans les pays étrangers.

Vous avez vu mon d’Hornoy à l’occasion d’une certaine Olympie ; seriez-vous homme à le voir à l’occasion d’un certain Portatif. Pourriez-vous l’encourager, s’il a besoin qu’on l’encourage ? Vous êtes un vrai frère, qui secourez dans l’occasion les frères opprimés.

On doit avoir actuellement les édits ; j’en suis curieux comme d’une pièce nouvelle. Mandez-moi, je vous prie, si cette pièce réussit, ou si elle est sifflée. L’Arbitrage[2] ne fera pas une grande sensation ; on est las de toutes ces disputes ; et quand il s’agit de sottises présentes, on se soucie fort peu de celles qui sont attribuées au cardinal de Richelieu.

Il y a d’autres sottises qui doivent être l’objet éternel de l’attention des frères ; partant, ècr. l’inf…


5857. — À M. L’ABBÉ DE SADE.
À Ferney, 26 décembre.

Vous avez écrit à un aveugle, monsieur, et j’espère que je ne serai que borgne quand j’aurai l’honneur de vous revoir. Soyez sûr que je vous verrai de très-bon œil, s’il m’en reste un. Les neiges du mont Jura et des Alpes m’ont donné d’abominables

  1. Voyez la note 3, page 384.
  2. Arbitrage entre M. de Voltaire et M. de Foncemagne, tome XV, page 321.