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Grandval et les demoiselles Doligny et Luzy[1]. Je vous ai envoyé un dernier double.

Le prince[2] a renoncé à la librairie, et le marquis, son frère, m’a écrit qu’il faisait partir les exemplaires dont Pierre Corneille a besoin.

M. de Pingon a accepté l’arbitrage de l’ordre de Malte. Ma petite famille et moi, nous vous faisons les plus tendres et les plus respectueux remerciements.

Je suis votre lettre pas à pas. J’envoie demain Mme Denis au grand Tronchin ; elle saura de quoi il est question. Je doute beaucoup qu’on l’ait consulté, car on ne veut pas passer pour malade. Mais voici ce que je vais faire : j’écrirai moi-même au malade, et peut-être je découvrirai de quoi il est question.

Vous êtes un véritable ange gardien d’avoir si bien profité de l’apoplexie du sieur Rengé. Ces tours-là, que vous me faites quelquefois, échauffent mon cœur et le remplissent de reconnaissance ; mais ils redoublent aussi l’amertume que je sens d’être destiné à mourir sans baiser le bout de vos ailes. J’en dis autant à Mme d’Argental. Vous ne me parlez point de sa santé ; je présume, par votre silence, qu’elle est meilleure.

Mes yeux vous demandent grâce pour la révision des roués. J’use actuellement d’une eau qui me fait espérer que je serai au moins borgne, et alors je relirai les roués de bon œil et de sang-froid. J’en jugerai comme de l’ouvrage d’un autre, et j’y travaillerai avec l’ardeur et le soin que vos ordres et vos bontés m’inspirent.

La requête de mon cher curé pour me voler mes dîmes est entre les mains du procureur général de Dijon ; voilà tout ce que j’en sais. Je n’en suis pas mieux informé que des vingt édits qu’on enregistre ou qu’on n’enregistre pas avec tant de cérémonie.

Permettez, mes divins anges, que je présente mes respects à M. le duc de Praslin.

  1. Mlle Doligny venait de débuter avec un grand succès qu’elle ne devait qu’à son mérite, car la nouvelle ingénue était médiocrement jolie ; mais elle réunissait à la finesse, à l’enjouement, une sensibilité naturelle, et surtout une décence parfaite. C’est elle qui joua d’original Rosine du Barbier de Séville. Elle quitta le théâtre pour se marier. L’honnêteté de sa conduite, que relevaient encore ses talents, lui valut une pension particulière de Louis XVI. Sous le précédent règne, elle l’aurait obtenue à un titre tout différent. — Mlle Luzy était une soubrette très-jolie et très-éveillée. Elle se retira en 1781. On ne dit pas que Louis XVI lui ait fait une pension. (A. F.)
  2. Philibert Cramer.