Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome43.djvu/386

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Remerciez Dieu de ce qu’il s’est trouvé à la fois tant de savants personnages qui tous ont contribué à démolir le trône de l’erreur, et à rendre les hommes plus raisonnables et plus gens de bien.

Enfin, mon cher ange, soyez bien convaincu que je suis trop idolâtre et trop enthousiaste de la vérité peur l’altérer le moins du monde.

À l’égard du testament relié en maroquin rouge[1], la faute en est faite. Cette petite et innocente plaisanterie pourrait-elle blesser M. de Foncemagne, surtout quand ce n’est pas une viande sans sauce, et quand j’assaisonne la raillerie d’un correctif et d’un éloge ? J’ai envoyé l’ouvrage à M. de Foncemagne, l’estimant trop pour croire qu’il en fût offensé.

Enfin pourquoi voudriez-vous que je supprimasse le trait de l’hostie[2] et du marquis Dupuis, duc de La Vieuville, quand cette aventure est rapportée mot pour mot dans mon Essai sur l’Histoire générale, tome, page 29, édition de 1761[3] ? Supprimer un tel article dans ma réponse, après l’avoir imprimé dans mon histoire, et après l’avoir envoyé à M. le maréchal de Richelieu lui-même ; ôter d’une édition ce qui est dans une autre, ce serait me décréditer sans aucune raison.

Vous voyez donc bien, mon cher ange, que la vérité et la convenance exigent que l’ouvrage paraisse dans Paris dans le même état où je soupçonne que le roi l’a déjà vu ; sans quoi je paraîtrais désavouer les faits sur lesquels je me suis fondé.

Pardonnez, je vous prie, à mes petites remontrances. L’histoire deviendrait un beau recueil de mensonges si l’on n’osait rapporter ce qu’ont fait les rois et les ministres il y a cent cinquante années, de peur de blesser la délicatesse de leurs arrière-cousins. Je vous supplie donc instamment de vouloir bien agréer la bonté de M. Marin, qui veut bien faire imprimer ma réponse à M. de Foncemagne, avec les dernières additions que j’ai envoyées nouvellement.

Au reste, il résultera de toute cette dispute, ou que le Testament du cardinal de Richelieu n’est point de lui ; ou que, s’il en est, il a fait là un bien détestable ouvrage. Je sais, à n’en pouvoir douter, que le roi a lu deux fois ce testament il y a environ vingt ans ; et je crois qu’il est bien important pour le royaume que le

  1. Voyez tome XV, page 286.
  2. Voyez tome XXV, page 289.
  3. Dans la présente édition, tome XIII, page 1.