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la grange auprès de laquelle ils couchaient, et les brûla tous deux pour réparer auprès de Dieu l’injustice du juge, qui les avait absous. Cela s’est passé dans un gros bourg appelé Longchaumois ; et cela se passerait dans Paris, s’il n’y avait eu des Descartes, des Gassendi, des Bayle, etc., etc.

On a donc plus d’obligation aux philosophes qu’on ne pense ; eux seuls ont changé les bêtes en hommes. Le Julien du marquis d’Argens[1] réussit beaucoup chez tous les savants de l’Europe ; mais il n’est pas connu à Paris : on y craint trop pour l’erreur, qui est encore chère à tant de gens.

Avez-vous entendu parler de la nouvelle édition du Testament du cardinal de Richelieu[2] ? On croit m’avoir démontré que ce testament est authentique ; mais je me sens de la pâte des hérésiarques : je n’ai jamais été plus ferme dans mon opinion, et vous entendrez bientôt parler de moi. Cela vous amusera ; je m’en rapporterai entièrement à votre jugement.

Je ne sais pourquoi frère Protagoras ne m’écrit point ; je n’en compte pas moins sur son zèle fraternel. Hélas ! si les philosophes s’entendaient, ils deviendraient tout doucement les précepteurs du genre humain.


5815. — À M.  DUCLOS[3].
Aux Délices, 7 novembre.

M. Duclos est prié de juger le petit procès dont on lui envoie les pièces[4] ; si M. de Foncemagne n’a pas reçu encore l’exemplaire que lui envoie son respectueux et opiniâtre antagoniste, M. Duclos est supplié de lui en donner un.


5816. — À M.  D’ALEMBERT.
9 novembre.

J’ai su par M. Duclos, mon cher et grand philosophe, qu’il s’était dit un petit mot à l’Académie touchant le Portatif. C’est vous, sans doute, qui m’avez rendu justice, et qui avez certifié que cet ouvrage est de plusieurs mains : recevez mes remerciements. Il est plus difficile quelquefois de faire connaître la

  1. Voyez l’article de Voltaire sur ce livre, tome XXV, page 178.
  2. Voyez la note, tome XXV, page 277.
  3. Éditeurs, de Cayrol et François.
  4. Les Doutes nouveaux, tome XXV, page 277.