Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome43.djvu/376

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

duc de Praslin débutât, dans une séance du conseil, en disant : Le Portatif n’est pas de V : mais il est indubitable, il est démontré, que le Portatif est de plusieurs mains ; et si vous en doutez, je vous enverrai l’original de Messie, avec la lettre de l’auteur, tous deux de la même écriture. Alors, étant convaincu de la vérité, vous la ferez mieux valoir ; et M. le duc de Praslin, convaincu par ses yeux, serait plus en droit de dire dans l’occasion : « V, n’a point fait le Portatif ; il est de plusieurs mains. »

Je sais qu’on fait actuellement une très-belle édition de ce Portatif en Hollande, revue, corrigée, et terriblement augmentée. C’est un ouvrage très-édifiant, et qui sera fort utile aux âmes bien nées.

Au reste, que peut-on dire à V. quand V. n’a donné cet ouvrage à personne, et quand il a crié le premier au voleur, comme Arlequin dévaliseur de maisons ? V. est intact, V. s’enveloppe dans son innocence[1] ; V. reprendra les roués en considération, quand il pourra avoir au moins la moitié d’un œil. V. remercie tendrement son ange pour notre gendre, lequel est assigné à comparoir au grand conseil, et à plaider contre les religieux corsaires de Malte. Nous sommes très-disposés à en passer par ce que monsieur l’ambassadeur de Malte voudra. Je suis persuadé que l’ordre dépenserait beaucoup d’argent à cette affaire, et y gagnerait très-peu de chose. V. remercie surtout pour la grande affaire des dîmes, dans laquelle heureusement son nom ne sera point prononcé : ce nom fait un assez mauvais effet quand il s’agit de la sainte Église.

Sub umbra alarum tuarum[2].


5811. — À M.  LE COMTE D’ARGENTAL.
Aux Délices, 5 novembre.

Voici, mon cher ange, un autre procès[3] ; jugez-moi avec M. le duc de Praslin, et jugez le cardinal de Richelieu. Ce petit procès peut amuser, et faire diversion. Je crois que M. le maréchal de Richelieu et Mme  la duchesse d’Aiguillon, tout opiniâtres

  1. Horace a dit, livre III, ode xxix, vers 54-55 :

    · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · Mea
    Me virtute involvo.

  2. Psaume xvi, verset 8.
  3. Voltaire envoyait à d’Argental les Doutes nouveaux sur le testament attribué au cardinal de Richelieu ; voyez tome XXV, page 277.