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l’occasion un mot des dîmes. Je crains la Saint-Martin[1] autant que les buveurs l’aiment. Je suis à vos pieds et au bout de vos ailes.


5743. — À M.  PIERRE ROUSSEAU[2].
13 auguste 1764, à Ferney.

Il est vrai, monsieur, que j’ai fait quelques extraits, mais en très-petit nombre, pour l’ouvrage dont vous me parlez ; je n’ai pu refuser cette complaisance au ministre qui le protège et qui m’honore de ses bontés. Mais j’ai été absolument hors d’état de continuer ce petit travail. Mon âge, ma mauvaise santé, et quelques autres occupations, ne me l’ont pas permis ; mais si je découvre quelque chose qui ne soit pas indigne de votre journal, je ne manquerai pas de vous l’envoyer. Vous savez combien les lettres me sont chères et combien vous augmentez mon goût pour elles.

Comptez, monsieur, sur les sentiments de votre très-humble et très-obéissant serviteur.


5744. — À M.  LE COMTE D’ARGENTAL.
20 auguste.

Mes divins anges, j’ai montré votre lettre et votre savant mémoire au petit défroqué. Je lui ai dit : « Vous voyez que les anges pensent comme moi. Combien de fois, petit frère, vous ai-je averti qu’il ne fallait pas qu’on envoyât Julie prier Dieu, quand on va assassiner les gens ! Cela seul serait capable de faire tomber une pièce. — Je m’en suis bien douté, m’a-t-il répondu, et j’ai eu toujours de violents scrupules. — Que n’avez-vous donc supprimé cette sottise ? — Elle est corrigée, a dit le pauvre enfant, aussi bien que tous les endroits que vos anges reprennent. J’ai pensé absolument comme eux, mais j’ai corrigé trop tard. Je m’étais follement imaginé que la chaleur de la représentation sauverait mes fautes : je suis jeune, j’ai peu d’expérience, je me suis trompé. J’ose croire que si la pièce, telle qu’elle est aujourd’hui, était bien jouée à Fontainebleau, elle pourrait reprendre faveur.

  1. La Saint-Martin (11 novembre) était l’époque de la rentrée des tribunaux, et aussi celle de repas où l’on mangeait une oie : le vin n’y était pas épargné. (B.)
  2. Publiée par M. Capitaine Recherches sur les journaux liègeois.). Cette lettre nous a été communiquée par M. F. Brunetiére, ainsi que les lettres 3088, 3107, extraites de la même rarissime brochure.