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5692. — À MADAME ÉLIE DE BEAUMONT[1].
À Ferney, 29 juin.

Je vous dois, madame, de nouveaux remerciements et de nouveaux éloges. Votre joli roman m’a fait vite quitter des fatras d’histoire qui m’occupaient.


L’histoire dit ce qu’on a fait ;
Un bon roman, ce qu’il faut faire.
Vous nous avez peint trait pour trait
Les vertus avec l’art de plaire :
Et l’on peut dire en cette affaire
Que le peintre a fait son portrait.


Je ne suis pas moins touché du mémoire pour Potin[2], ou plutôt pour deux millions d’hommes. M. de Beaumont et vous, madame, êtes sûrs de l’estime publique. Souffrez que ma lettre soit pour vous deux, que je vous félicite d’appartenir l’un à l’autre, et que je joigne ma sensible reconnaissance, madame, au respect que j’ai pour vous.


5693. — À M. LE COMTE D’ARGENTAL,
À Ferney, 29 juin.

Mes divins anges, vous devez avoir reçu, de la part de l’ex-jésuite, force vers pour les roués. Ce pauvre diable me dit toujours que la chaleur de la saison et la froideur de la pièce le font trembler. Il se souvient surtout qu’il a oublié de corriger ce vers :


À mon cœur désolé que votre pitié s’ouvre[3].


Il dit qu’il ne manquera pas de le corriger pour la première poste ; il dit qu’il n’est pas aujourd’hui fort en train.

J’ai reçu une lettre anonyme de Toulouse, assez bien raisonnée en apparence ; mais le fond de la lettre est que tous les Calas

  1. Anne-Louise Morin du Menil, épouse de J.-B.-J. Élie de Beaumont, née à Caen en 1729, morte à Paris le 12 janvier 1783, est auteur des Lettres du marquis de Roselle, Amsterdam (Paris, Cellot), 1764, deux volumes in-12.
  2. Voyez la note 2, page 217.
  3. Ce vers me semble avoir appartenu à la scène iii de l’acte deuxième du Triumvirat : mais il ne rime avec aucun de ceux de la pièce. (B.)