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eût de l’esprit dans le sacré collège. Vous n’aviez pas encore le chapeau dans ce temps-là. Je tiens que Votre Éminence a plus d’esprit et de talent que lui, sans aucune comparaison. Je voudrais savoir si vous faites quelque chose, ou si vous continuez de lire. Je ne demande pas indiscrètement ce que vous faites, mais si vous faites. Le cardinal de Richelieu faisait de la théologie à Luçon, Dieu vous préservera de cette belle occupation. Je voudrais encore savoir si vous êtes heureux, car je veux qu’on le soit malgré les gens. Votre Éminence dira : « Voilà un bavard bien curieux ; » mais ce n’est pas curiosité, cela m’importe ; je veux absolument qu’on soit heureux dans la retraite.

Vous m’avez permis de vous envoyer dans quelque temps des remarques sur Corneille ; vous en aurez, et je suis persuadé que ce sera un amusement pour vous de corriger, retrancher, ajouter. Vous rendriez un très-grand service aux lettres. Eh ! mon Dieu ! qu’a-t-on de mieux à faire, et quelles sottises de toutes les espèces on fait à Paris ! Je ne reverrai jamais ce Paris ; on y perd son temps, l’esprit s’y dissipe, les idées s’y dispersent ; on n’y est point à soi. Je ne suis heureux que depuis que je suis à moi-même ; mais je le serais encore davantage si je pouvais vous faire ma cour. Cependant je suis bien vieux. Vale. Monseigneur, au pied de la lettre,


Gratia, fama, valetudo · · · · ·

(Hor., lib. I, ep. iv, v. 10.)

On m’a envoyé les Chevaux et les Anes[1] : voulez-vous que je les envoie à Votre Éminence ?


4777. — À M.  LE COMTE D’ARGENTAL.
17 décembre.

Ils diront, ces anges : « Il n’y a pas de patience d’ange qui puisse y tenir ; nous avons là un dévot insupportable. » Renvoyez-moi donc votre exemplaire, et prenez celui-là. Je ne sais plus qu’y faire, mes tutélaires ; je suis à bout, excédé, rebuté sur l’ouvrage ; mais, croyez-moi, le succès est dans le fond du sujet. S’il est intéressant, il ne peut pas l’être médiocrement ; s’il n’y a point d’intérêt, rien ne peut l’embellir.

  1. Voyez cette pièce, tome X.