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Ce siècle commence à être le triomphe de la raison ; les jésuites, les jansénistes, les hypocrites de robe, les hypocrites de cour, auront beau crier, ils ne trouveront dans les honnêtes gens qu’horreur et mépris. C’est l’intérêt du roi que le nombre des philosophes augmente, et que celui des fanatiques diminue. Nous sommes tranquilles, et tous ces gens-là sont des perturbateurs : nous sommes citoyens, et ils sont séditieux ; nous cultivons la raison en paix, et ils la persécutent ; ils pourront faire brûler quelques bons livres, mais nous les écraserons dans la société, nous les réduirons à être sans crédit dans la bonne compagnie ; et c’est la bonne compagnie seule qui gouverne les opinions des hommes. Frère Elisée[1] dirigera quelques badaudes, frère Menoux quelques sottes de Nancy ; il y aura encore quelques convulsionnaires au cinquième étage ; mais les bons serviteurs de la raison et du roi triompheront à Paris, à Voré[2], et même aux Délices.

On envoya à Paris, il y a deux mois, des ballots de l’Histoire de Pierre le Grand ; Robin devait avoir l’honneur de vous en présenter un, à M.  Saurin un autre. J’apprends qu’on a soigneusement gardé les ballots à la chambre nommée syndicale, jusqu’à ce qu’on eût contrefait le livre à Paris : grand bien leur fasse ! Je vous embrasse, vous aime, vous estime, vous exhorte à rassembler les honnêtes gens, et à faire trembler les sots.

V., qui attend H.

4316. — À M.  LE COMTE D’ARGENTAL.
28 octobre.

Pardon à mes divins anges. Jamais le prophète Grimm ne met au bas de ses lettres un petit signe qui les fasse reconnaître ; jamais il ne donne son adresse. Je prends le parti de vous adresser ma réponse[3]. Lekain m’a mandé qu’il avait en vain combattu Mlle  Clairon quand elle me coupait mes membres, quand elle m’étriquait le second acte auquel la dernière scène est absolument nécessaire, quand elle écourtait ses fureurs, etc. J’ai répondu à Lekain, j’ai écrit à Clairon, j’ai soumis ma lettre aux anges, j’ai étalé le plus noble zèle contre la Grève[4].

  1. J.-Fr. Copel, connu sous le nom de P. Élisée, né à Besançon en 1726.
  2. Château d’Hcevétius (Orne),
  3. Elle n’a pas été recueillie. (Cl.)
  4. Allusion à l’échafaud ; voyez lettre 4297.