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Monseigneur, il m’importe cependant ; et je partirais en poste pour savoir ce qui en est si cette Providence, qui fait tout pour le mieux, ne me traitait pas misérablement. Elle maltraite fort votre petit vieillard suisse, et m’a fait l’individu le plus ratatiné et le plus souffrant de ce meilleur des mondes. Je ferais vraiment une belle figure au milieu des fêtes de Vos Altesses électorales ! Ce n’était que dans l’ancienne Égypte qu’on plaçait des squelettes dans les festins. Monseigneur, je n’en peux plus. Je ris encore quelquefois ; mais j’avoue que la douleur est un mal. Je suis consolé si Votre Altesse électorale est heureuse. Je suis plus fait pour les extrêmes-onctions que pour les baptêmes.

Puisse la paix servir d’époque à la naissance du prince que j’attends ! Puisse son auguste père conserver ses bontés au malingre, et agréer les tendres et profonds respects du petit Suisse ! etc.


4568. — À M. JEAN SCHOUVALOW[1].
À Ferney, 11 juin.

Monsieur, vous vous êtes imposé vous-même le fardeau de l’importunité que mes lettres, peut-être trop fréquentes, doivent vous faire éprouver : voilà ce que c’est que de m’avoir inspiré de la passion pour Pierre le Grand et pour vous : les passions sont un peu babillardes.

Votre Excellence a dû recevoir plusieurs cahiers qui ne sont que de très-faibles esquisses ; j’attendrai que vous fassiez mettre en marge quelques mots qui me serviront à faire un vrai tableau ; ils ont été écrits à la hâte. Vous distinguerez aisément les fautes du copiste et celles de l’auteur, et tout sera ensuite exactement rectifié : j’ai voulu seulement pressentir votre goût.

Dès que j’ai pu avoir un moment de loisir, j’ai lu les remarques[2] sur le premier tome, envoyées par duplicata, desquelles je n’ai reçu qu’un seul exemplaire, l’autre ayant été perdu, apparemment avec les autres papiers confiés à M. Pouschkin.

Je vous prierai en général, vous, monsieur, et ceux qui ont fait ces remarques, de vouloir bien considérer que votre secrétaire des Délices écrit pour les peuples du Midi, qui ne prononcent point les noms propres comme les peuples du Nord.

  1. Nous avons cité cette lettre tome XVI, pages 391 et 419.
  2. Elles étaient de J.-F. Muller, à qui est adressée la lettre 1834 (tome XXXVI, page 456.)