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personnages dont vous me parlez. J’y ajoute que Chaumeix, a, dit-on, gagné la v… à l’Opéra-Comique ; que l’abbé Trublet prétend avoir fait autrefois beaucoup de conquêtes par le confessionnal, lorsqu’il était prêtre habitué à Saint-Malo. Il me dit un jour qu’en prêchant aux femmes de la ville il avait fait tourner toutes les têtes ; je lui répondis : C’est peut-être de l’autre côté.

L’Écossaise a été bravement et avec affluence jusqu’à la seizième représentation. On assure que les comédiens la reprendront cet hiver, et ils feront fort bien. J’ai lu, le jour de la Saint-Louis, à l’Académie française, un morceau[1] contre les mauvais poëtes, et en votre honneur. Je ne vous ai trouvé que deux défauts impardonnables, c’est d’être Français, et vivant. C’est par là que je finissais, et le public a battu des mains beaucoup moins pour moi que pour vous. J’ai aussi étrillé les wasp, en passant. En un mot, cela a fort bien réussi. Adieu, mon cher et grand philosophe.


4243. — À M.  DAMILAVILLE.
3 septembre.

Je vous envoie, monsieur, une lettre[2] à cachet volant pour M.  Diderot, Je crois que vous vous intéressez autant que lui à tout ce que mon cœur lui dit ; vous pensez tous deux de la même façon. C’est un grand bonheur pour moi que je vous aie connus tous deux. Ce n’est, à la vérité, que par vos lettres ; mais votre âme s’y peint, et elle enchante la mienne. Je vis dans la retraite, mais je n’y ai pas un moment de loisir. Je dois quatre lettres ; M.  Thieriot ; je ne lui écris qu’un petit billet, et je vous supplie, monsieur, de vouloir bien vous en charger. Je fais mes lettres courtes, pour ne pas trop enfler le paquet.

On m’envoie souvent de mauvais vers, de mauvaises brochures ; vos lettres me consolent. Si vos occupations vous permettaient de me dire quelquefois des nouvelles de la littérature, et surtout de M.  Diderot, ce serait une nouvelle obligation que je vous aurais.

Comptez, monsieur, que je sens jusqu’au fond du cœur le prix de l’amitié que vous voulez bien me témoigner.

Oserais-je vous supplier de faire parvenir, par la petite poste, cette lettre à Mme  Belot ?

  1. Réflexions sur la poésie, écrites à l’occasion des pièces que l’Académie française a reçues, en 1760, pour le concours. Ce morceau fait partie des Mélanges de littérature, etc., par d’Alembert.
  2. Cette lettre nous est inconnue, comme le petit billet à Thieriot et la lettre à Mme  Belot.