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bien vite prouvé que tout est mal. Il m’a fait perdre une partie de mon bien. Je m’imaginai que parce qu’il mariait son neveu à une de mes parentes, je devais avoir confiance en lui : mais à présent je n’ai d’autre ressource que d’abandonner mes projets.


· · · · · · · · · · Pendent opéra interrupta, minæque
Murorum ingentes.


Ainsi se passe une partie de la vie à se tromper dans ses idées. Il faut prendre son parti. Partir toujours du point où l’on est, regarder le moment présent comme celui où tout commence pour nous, calculer l’avenir et jamais le passé, regarder ce qui s’est fait hier comme s’il était arrivé du temps de Pharamond : c’est, je crois, la meilleure recette. Je ne voudrais pourtant pas oublier le passé quand je songe aux moments où j’ai eu l’honneur de vivre avec vous. Ma santé est bien moins mauvaise que mes affaires ; mon cœur est à vous bien véritablement.


4013. — À M. LE PRÉSIDENT DE BROSSES[1].
Aux Délices, 2 janvier 1760.

J’ai l’honneur, monsieur, de présenter mes respects à toute votre famille, et à vous surtout, du meilleur de mon cœur au commencement de cette année. J’attends vos ordres pour la conclusion de l’affaire de Tournay. Je me flatte que quand vous serez débarrassé des premiers soins qu’exige votre séjour à Dijon, vous voudrez bien instruire le sieur Girod de vos volontés et l’honorer de vos pleins pouvoirs.

Permettez aussi, monsieur, que je vous supplie de me faire communiquer les pièces concernant les droits de la terre. La petite affaire de Panchaud me rend surtout cette communication nécessaire. Vous savez bien, monsieur, que la notoriété publique ne suffit pas pour constater un droit de haute justice. Il faut quelque acte, quelque exemple. Le lieu nommé la Perrière est situé sur un fief de Genève. Il est à présumer dès lors que le seigneur de Tournay n’a pas droit de juridiction dans cet endroit. On dit que, quand il y a eu des catholiques dans ce terrain, ils ont été à la messe à Chambésy. Mais, monsieur, une messe n’établit point une haute justice.

Quant à la justice qu’on a rendue au nommé Panchaud, il

  1. Éditeur, Th. Foisset.