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vous, madame, comme faisaient autrefois les troubadours ; mais Dieu veuille que je puisse me venir mettre à vos pieds sur la fin de l’hiver ! La grande maîtresse des cœurs daignerait-elle me revoir avec quelque plaisir ?

Pour moi, madame, avec quel transport je viendrais rendre encore mes hommages à ce que j’ai vu de plus respectable et de plus aimable, et lui renouveler mon profond respect.


3974. — À M. TRONCHIN, DE LYON[1].
12 novembre.

Je ne regrette point l’argent que je mets en bœufs et en vaches ; mais je regrette un denier donné aux traitants. Je regrette encore plus l’argent qu’on va employer pour le débarquement. Il faut trois miracles pour qu’il réussisse : le premier, qu’on nous laisse aborder sans nous battre ; le deuxième, qu’on nous laisse dans le pays quelque temps sans nous exterminer ; le troisième, que nous puissions revenir. Ces idées ne sont point plaisantes.


3975. — À M. LE PRÉSIDENT DE BROSSES[2].
Aux Délices, 14 novembre.

Votre lettre, monsieur, a croisé la mienne. Elle fortifie les raisons que j’ai de me plaindre des mauvais procédés de Girod, qui ne m’a communiqué aucun papier concernant les droits d’une terre qui m’appartient pendant ma vie, pleinement et sans restriction.

Je suis persuadé que les délations de cet homme ne vous séduiront pas, et que vous ne voudrez jamais avoir à vous reprocher d’avoir mis dans la balance le tort imaginaire de quelques écus avec le bien réel de vingt mille francs que je procure à la terre, après l’avoir achetée si chèrement.

Je continue très-certainement à faire le bien de la terre en agrandissant les prés aux dépens de quelques arbres : il faut que Girod soit bien ignorant pour ne pas savoir qu’un char de fourrage vaut trente-six livres au moins, et souvent deux louis d’or aux portes de Genève. Feu M. le bailli de Brosses avait toujours projeté ce que je fais.

Mais, monsieur, pour trancher toutes ces mauvaises difficultés

  1. Éditeurs, de Cayrol et François.
  2. Éditeur, Th. Foisset.