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2523. — DE M. C. GROSS[1],
chancelier de la république de berne.
Berne, ce 21 février 1753.

On m’a remis la lettre que vous avez pris la peine d’écrire[2] au secrétaire principal du conseil souverain de cette ville avec son incluse pour Leurs Excellences, par laquelle vous insistez, monsieur, à leur demander la permission de leur dédier la dernière de vos pièces de théâtre[3]. Je n’ai pas manqué de la produire en sénat, où c’est que, lecture en ayant été faite, j’ai reçu ordre de Leurs Excellences d’avoir l’honneur de vous dire, monsieur, en réponse, que quoiqu’elles se trouvent extrêmement flattées de l’offre d’un homme de votre réputation, et qui s’est rendu si célèbre dans la république des lettres, que cependant des raisons importantes, qui n’échapperont pas à votre pénétration, ne leur permettent pas de condescendre à votre demande ; quelque portées que Leurs Excellences soient d’ailleurs de vous donner, monsieur, en tous rencontres des marques de la considération particulière qu’elles auront toujours pour une personne de votre caractère. Aussi pouvez-vous, monsieur, être persuadé qu’indépendamment des raisons qui les empêchent d’accepter la dédicace de votre pièce elles vous accorderont toujours leur protection, laquelle vous sera toute acquise, monsieur, si jamais vous pouviez vous trouver dans le cas d’en avoir besoin, ou qu’elle puisse vous être de quelque utilité. Voilà, monsieur, ce que j’ai ordre de vous dire de leur part. Quant à mon particulier, j’espère, monsieur, que vous voudrez bien me faire la justice d’être persuadé que, régis ad exemplum, je ne resterai pas en arrière lorsqu’il s’agira de vous convaincre des sentiments de vénération avec lesquels j’ai l’honneur d’être, monsieur,


C. Gross,
chancelier de la république.

2524. — À M. LE MARQUIS D’ARGENS.

Frère Paul, je vous attendais ; je comptais souper avec vous aujourd’hui, et nous nous fîmes hier une fête de vous promettre au révérend père abbé. Frère, savez-vous bien que je viens de me coucher ? Mais, puisque mon frère est toujours visité de Dieu, et affligé en son corps terrestre, je vais me lever, et mon âme va tâcher de consoler la sienne. J’offre pour vous mes ferventes prières, et je vous donne le baiser de paix. Dans un quart d’heure je passerai de ma cellule dans votre ermitage.


Frère Voltaire.
  1. Publiée dans la Suisse illustrée du 25 mai 1872, par M. C.-G. Kœnig.
  2. Le 26 janvier 1753.
  3. Rome sauvée, ou Catilina.