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valoir. Je vous en laisse absolument le maître, et je vous renouvelle les assurances du plus tendre attachement.


2394. — À M. FORMEY.
Sans-Souci, le 15 juillet.

Recevez mes remerciements, monsieur.

Il y a dans le dernier journal dont vous m’avez honoré un morceau de M. de Haller[1] qui m’a paru d’un genre supérieur : on ne peut mieux parler des choses qu’on ne peut comprendre.

Les hommes ne savent point encore comme ils font des enfants et des idées.

Vous qui avez si bien travaillé dans ces deux genres, vous devriez en savoir plus de nouvelles que personne. Vale.


2395. — À M. LE MARQUIS D’ARGENS.

Mon cher frère, vous êtes plus heureux que vous ne pensez. M. Delaleu[2], voyant que Mme d’Argens n’est pas loin de sa trentième année, a présenté un mémoire pour la faire insérer dans la classe de ceux qui ont trente ans passés ; il l’a obtenu. Mais, comme cette opération a pris du temps, vous y perdez cinq mois d’arrérages que vous sacrifierez volontiers. Vous aurez votre contrat dans un mois.

Mais, frère, dans le temps que je fais vos affaires temporelles, vous mettez mes affaires spirituelles, celles de mon cœur, dans un cruel état. Comment avez-vous pu vous fâcher d’une plaisanterie innocente sur Haller[3] ? en quoi cette plaisanterie pouvait-elle vous regarder ? était-ce de vous qu’on pouvait rire ? peut-il vous entrer dans la tête que j’aie voulu vous déplaire ? Songez avec quelle dureté, quelle mauvaise humeur, et de quel ton, vous avez dit et répété qu’il y avait des gens qui craindraient de perdre trois mille écus ; songez que vous me reprochiez, à table, avec véhémence, d’aimer ma pension, dans le temps même que j’offrais de sacrifier mille écus pour travailler avec vous. Le roi a

  1. Le cahier de Mars-Avril 1752 de la Bibliothèque impartiale contient un compte rendu de la nouvelle édition des Primæ lineæ phisiologiæ de Haller, Gottingue, 1751, in-8°. L’article, terminé par une citation de deux pages, doit être du marquis d’Argrens, qui se fâcha de la plaisanterie de Voltaire. (B.)
  2. Notaire de Voltaire.
  3. Voyez la lettre précédente.