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sécuteur du roi Jacques, ceux-là donneront la préférence à Louis XIV. »

D’ailleurs, M. d’Argenson ne peut ignorer que Louis XIV et Guillaume ont toujours été deux objets de comparaison dans l’Europe. Il ignore encore moins que l’histoire ne doit point être un fade panégyrique ; et, s’il a eu le temps de lire le livre, il a pu s’apercevoir que, sans m’écarter de la vérité, j’ai loué, autant que je l’ai pu, et autant que je l’ai dû, la nation et ceux qui l’ont bien servie. L’article de son père[1] n’a pas dû lui déplaire.

Enfin, monsieur, j’ai prétendu ériger un monument à la vérité et à la patrie, et j’espère qu’on ne prendra pas les pierres de cet édifice pour me lapider. Je me flatte encore que vous ne vous bornerez pas au service de m’avoir éclairé. Je voudrais que la postérité sût que l’homme du royaume le plus capable de me donner des lumières a été celui dont j’ai reçu le plus de marques de bonté.

Je vous supplie de ne me pas oublier auprès de du Mme  Deffant, et de me conserver une amitié qui fait ma gloire et ma consolation.

P. S. J’avais toujours ouï dire que le prince de Condé était mort à Chantilly[2] de sa maladie de courtisan prise à Fontainebleau. Je n’ai point ici de livres ; si vous me trompez, je mets cela sur votre conscience.

À propos, je suis bien malade ; si je meurs, dites, je vous en prie, comme frère Jean[3] : J’y perds un bon ami.


2327. — À FRÉDÉRIC II, ROI DE PRUSSE.
Le 30 janvier.

Sire, quant à Pascal, je vous supplie de lire la page 274 du second tome[4], que j’ai eu l’honneur d’envoyer à Votre Majesté, et vous jugerez si sa cause est bonne.

Quant à Mme  de Bentinck, elle n’a point de cuisine, et j’en ai une ici et une à Paris.

Quant aux procès et aux tracasseries, je n’en ai qu’avec la maladie cruelle qui me mène au tombeau.

Je vis dans la plus grande solitude et dans les plus grandes

  1. Voyez tome XIV, page 503.
  2. Voyez tome XIV, page 465.
  3. Rabelais, Pantagruel, livre IV, chap. xx.
  4. Voyez tome XV, page 47.