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Ces deux complets demandent que la voix se déploie d’une manière pompeuse et terrible, s’élevant par degrés, et finissant par des éclats qui portent l’horreur dans l’âme. Le premier est celui des Euménides :


Euménides, venez · · · · · · · · · · · · · · ·

(Acte IV, scène iv.)


Le second :


Que font tous ces amis dont se vantait Pammène ?

(Acte V, scène vi.)

Tout le sublime de la déclamation dans ces deux morceaux, les passages que vous faites si admirablement dans les autres de l’accablement de la douleur à l’emportement de la vengeance ; ici du débit, là les mouvements entrecoupés de curiosité, d’espérance, de crainte, les reproches, les sanglots, l’abandonnement du désespoir, et ce désespoir même tantôt tendre, tantôt terrible : voilà ce que vous mettez dans votre rôle ; mais surtout je vous demande de ne le jamais ralentir en vous appesantissant trop sur une prononciation qui en est plus majestueuse, mais qui cesse alors d’être touchante, et qui est un secret sûr pour sécher les larmes.

On ne pleure tant à Mérope que par la raison contraire.

Pour le coup, voilà mon dernier mot ; mais ce ne sera pas la dernière de mes actions de grâces.


2060. — À MADAME DE GRAFFIGNY.
Ce lundi au soir.

Il faut que je répare, madame, la sottise que j’ai faite de vous mener à la comédie dans un poulailler, et de cacher Mlle de Ligneville[1] dans un balcon. Souffrez que, mercredi, je vienne vous prendre ; nous vous placerons dans la troisième loge. Il y a des choses nouvelles dont je veux que vous soyez juge. Vous n’imaginez pas l’envie que j’ai de vous plaire ; elle égale mon respectueux attachement. V.

  1. Catherine de Ligneville (Lignéville ou Ligniville), née en 1719, nièce de Mme de Graffigny ; mariée, en 1751, à Helvétius, dont elle devint veuve à la fin de 1771 ; elle mourut le 12 août 1800.