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abominable bourreau, et législateur ! Quitter le trône pour le souiller ensuite de crimes ! Créer des hommes, et déshonorer la nature humaine ! Prince, qui faites l’honneur du genre humain par le cœur et par l’esprit, daignez me développer cette énigme. J’attendrai les mémoires que vos bontés voudront bien me communiquer, et je n’en ferai usage que par vos ordres. Je ne continuerai l’Histoire de Louis XIV, ou plutôt de son Siècle, que quand vous me le commanderez. Je ne veux … (Le reste manque.)


854. — À M. THIERIOT.

Je reçois votre lettre du 25, et bien des nouvelles qui me chagrinent. Premièrement, je suis assez fâché que Racine, que je n’ai jamais offensé, ait sollicité la permission d’imprimer une satire dévote de Rousseau contre moi. Je suis encore plus fâché qu’on m’attribue des épîtres sur la Liberté[1]. Je ne veux point me trouver dans les caquets de Molina ni de Jansénius. On m’envoie un morceau d’une autre pièce de vers[2] où je trouve un portrait assez ressemblant à celui du prêtre de Bicêtre ; mais, en vérité, il faut être bien peu fin pour ne pas voir que cela est de la main d’un académicien, ou de quelqu’un qui aspire à l’être. Je n’ai ni cet honneur ni cette faiblesse ; et si j’ai à reprocher quelque chose à ce monstre d’abbé Desfontaines, ce n’est pas de s’être moqué de quelques ouvrages des Quarante.

Je suis bien aise que vous ayez gagné un louis à gentil Bernard ; je voudrais que vous en gagnassiez cent mille à Crésus-Bernard,

Je n’ai point vu l’Épître sur la Liberté ; je vais la faire venir avec les autres brochures du mois. C’est un amusement qui finit d’ordinaire par allumer mon feu.

Autre sujet d’affliction. On me mande que, malgré toutes mes prières, les libraires de Hollande débitent mes Éléments de la Philosophie de Newton, quoique imparfaits ; or, da mi consiglio. Les libraires hollandais avaient le manuscrit depuis un an, à quelques chapitres près. J’ai cru qu’étant en France je devais à monsieur le chancelier le respect de lui faire présenter le manuscrit entier. Il l’a lu, il l’a marginé de sa main ; il a trouvé surtout le dernier chapitre peu conforme aux opinions de ce pays-ci. Dès que j’ai été instruit par mes yeux des sentiments de monsieur le

  1. Le deuxième Discours sur l’Homme.
  2. Voyez la variante du troisième Discours, au vers 94.