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ANNÉE 1718.

vous souviendriez de lui dans le temps que tous ouvrez le paradis à tout le monde.

Il prend la liberté de vous demander trois grâces : la première, de souffrir qu’il ait l’honneur de vous dédier la tragédie[1] qu’il vient de composer ; la seconde, de vouloir bien entendre quelque Jour des morceaux d’un poëme épique[2] sur celui de vos aïeux auquel vous ressemblez le plus ; et la troisième, de considérer que j’ai l’honneur de vous écrire une lettre où le mot de souscription ne se trouve point.

Je suis avec un profond respect, monseigneur, de Votre Altesse royale le très-humble et très-pauvre secrétaire des niaiseries,

Voltaire.



36. — À M. LE COMTE DE MAUREPAS[3].

Châtenay, 4 juillet 1718.

Monseigneur, les obligations que je vous ai m’encouragent à vous demander de nouvelles grâces. Vous concevez bien ce que c’est que le supplice d’un homme qui voit Paris de sa maison de campagne et qui n’a pas la liberté d’y aller. Je vous supplie de me permettre d’y passer trois jours pour des affaires qui sont très-importantes pour moi, et parmi lesquelles une des plus intéressantes est de vous faire ma cour et de vous remercier de toutes vos bontés. Un petit voyage à Paris, dans la situation où je suis, ressemble assez à la goutte d’eau que demande le mauvais riche[4] ! Serais-je assez malheureux pour être refusé comme lui ? M. le baron de Breteuil[5], qui doit vous rendre cette lettre, vous dira peut-être que je ne suis point indigne de la clémence de monseigneur le Régent ; mais il ne vous dira jamais combien je vous suis dévoué et avec quelle sincère vénération je suis, etc.[6].

    no 725 ; il contient quatre-vingt-cinq pièces de Voltaire ou relatives à Voltaire ; mais, parmi ces pièces, il en est qui sont de 1755. Ce portefeuille est donc un dossier concernant Voltaire. ( B.)

  1. Œdipe. Cette tragédie a été dédiée, non au Régent, mais à sa femme ; voyez tome II, page 8.
  2. « Croiriez-vous, dit Frédéric II, que ce fut à la Bastille même que le jeune poëte composa les deux premiers chants de la Henriade ? »
  3. Revue rétrospective, 1834, Détentions de Voltaire.
  4. Saint Luc, xvi, 24.
  5. Père de Mme  du Châtelet.
  6. Voltaire obtint, le 11 juillet 1718, permission de venir à Paris pour huit jours ; le 23 juillet, permission de rester à Paris encore un mois ; le 8 août, permission de rester pendant un mois seulement ; enfin le 12 octobre, permission de venir à Paris quand bon lui semblerait.