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Aujourd’hui, disciple nouveau
De Mansart et de Laguépierre,
Je tiens une toise, une équerre,
Je mets une cour au niveau ;
J’arrondis la forme grossière
D’un pilastre ou d’un chapiteau,
Et je sais façonner la pierre
Sous le dur tranchant du ciseau.
Dans la fable on nous fait entendre
Que du haut des cieux Apollon
Vint bâtir les murs d’Ilion,
Sur les rivages du Scamandre.
Mon sort est plus beau mille fois,
Plus heureux, plus digne d’envie ;
Il était le maçon des rois,
Et je suis celui d’Émilie.
Apollon, banni par les dieux,
Regretta la voûte azurée :
Que regretterai-je en ces lieux ?
C’est moi qui suis dans l’empyrée.

Je vous plains, mon cher ami, de n’être pas ici. Que vous êtes malheureux de juger des procès ! Que ne quittez-vous tout cela pour venir faire votre cour à Émilie !

Adieu, mon cher ami ; je vais faire poser des planches, et entendre ensuite des choses charmantes, et profiter plus dans sa conversation que je ne ferais dans tous les livres. Le Siècle de Louis XIV est entamé. Je ne sais comment nommer cet ouvrage : ce n’est point une histoire, c’est la peinture d’un siècle admirable. Vale, ama, et scribe.


494. — Á M. BERGER.
À Cirey, le 4 août.

Vous me mandez, monsieur, que je dois vous tenir compte de votre silence ; c’est pourtant le plus grand dépit que vous puissiez me faire. Vous savez combien vos lettres me font de plaisir, et à quel point votre commerce m’est précieux, N’attendez donc pas, pour me donner de vos nouvelles, que vous receviez des vers de Marseille. J’ai lu ceux de M. Sinetti, Je savais bien qu’il était tout aimable ; mais je ne savais pas qu’il fût poëte. Il y a, en vérité, de très-belles choses dans ce petit poème. J’y ai trouvé ce que j’aime, beaucoup d’images ; ut pictura poe-