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CORRESPONDANCE.
20. — À MADEMOISELLE DUNOYER.

Paris, le 10 février.

Ma chère Pimpette, toutes les fois que vous ne m’écrivez point, je m’imagine que vous n’avez point reçu mes lettres : car je ne peux croire que l’éloignement des lieux ait fait sur vous ce qu’il ne peut faire sur moi, et, comme je vous aime toujours, je me persuade que vous m’aimez encore. Éclaircissez-moi donc de deux choses : l’une, si vous avez reçu mes deux dernières lettres, et si je suis encore dans votre cœur ; mandez-moi surtout si vous avez reçu ma dernière, que je vous écrivis le 20 janvier, dans laquelle il était parlé de l’évêque d’Évreux, et d’autres personnes dont j’ai hasardé les noms ; mandez-moi quelque chose de certain par votre réponse à cette lettre ; surtout instruisez-moi, je vous conjure, de l’état de votre santé et de vos affaires ; adressez votre lettre à M. le chevalier de Saint-Fort, chez M. Alain, près les degrés de la place Maubert. Que votre lettre soit plus longue que la mienne ; je trouverai toujours plus de plaisir à lire une de vos lettres de quatre pages que vous n’en aurez à en lire de moi une de deux lignes.

Arouet.



21. — À MADAME LA MARQUISE DE MIMEURE.[1]
(Juillet) 1715.

J’ai vu, madame, votre petite chienne, votre petit chat, et Mlle Aubert. Tout cela se porte bien, à la réserve de Mlle Aubert, qui a été malade, et qui, si elle n’y prend garde, n’aura point de gorge pour Fontainebleau. À mon gré c’est la seule chose qui lui manquera, et je voudrais de tout mon cœur que sa gorge fût aussi belle et aussi pleine que sa voix.

Puisque j’ai commencé par vous parler de comédiennes, je vous dirai que la Duclos[2] ne joue presque point, et qu’elle prend

  1. Madelène de Carvoisin d’Achy, d’une famille distinguée de Picardie, mariée à Jacques-Louis Vallon, marquis de Mimeure (qu’on prononce Mimûre), reçu à l’Académie française le 1er  décembre 1707, mort le 3 mars 1719. Elle était intimement liée avec Voltaire, comme on le voit dans sa lettre de novembre 1724, à Mme de Bernières. (Cl.)
  2. Anne-Marie Châteauneuf, connue au théâtre sous le nom de Duclos, était née à Paris. C’était à elle que Voltaire avait d’abord adressé son Anti-Giton, conte (voyez tome IX, page. 561), qu’il adressa ensuite à Mlle Lecouvreur. Mlle Duclos avait débuté en 1693, se retira du théâtre en 1733, et mourut en 1748. Voltaire, à qui