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dépayser les alguazils. N’y viendriez-vous pas ? Adieu, tout cela ne m’empêche ni ne m’empêchera d’achever mon quatrième acte[1]. Vale, te amo.


409. — Á M. LE COMTE D’ARGENTAL.
Mai.

Encore une importunité, encore une lettre. Avouez que je suis un persécutant encore plus qu’un persécuté. La lettre de cachet m’en fait écrire mille.

Nardi parvus onyx eliciet cadum.

(Hor., lib. IV, od. xii, v. 17.)

Je vous supplie de faire rendre cette lettre à Mme  la duchesse d’Aiguillon. Je vous l’envoie ouverte ; ayez la honte d’y voir ma justification, et de la cacheter. Mille pardons. Vraiment, puisqu’on crie tant sur ces fichues Lettres, je me repens bien de n’en avoir pas dit davantage. Va, va, Pascal, laisse-moi faire ! tu as un chapitre sur les prophéties, où il n’y a pas l’ombre du bon sens ; attends, attends !

Où en sommes-nous, je vous prie ? De grâce, un petit mot touchant cet excommunié. Mon livre sera-t-il brûlé, ou moi ? Veut-on que je me rétracte, comme saint Augustin ? Veut-on que j’aille au diable ? Écrivez ou chez Demoulin, ou chez l’abbé Moussinot, ou, plutôt, à M. Pallu, et dites-lui qu’il garde un profond secret,


410. — Á MADAME LA DUCHESSE D’AIGUILLON[2].
Mai.

Si vous êtes encore à Paris, madame, permettez-moi d’avoir recours à la langue française dont vous vous servez si bien, plutôt qu’au vieux gascon, qui me serait à présent peu utile, je crois, auprès de monsieur le garde des sceaux. Je suis pénétré de reconnaissance, et je vous remercie, au nom de tous les partisans de Locke et de Newton, de la bonté que vous avez eue de mettre Mme  la princesse de Conti dans les intérêts des philosophes, malgré les criailleries des dévots. On me mande, dans ma retraite, que le parlement veut me faire condamner, et me traiter comme un mandement d’évêque. Pourquoi non ? Il y a bien eu des arrêts contre l’antimoine, et en faveur des formes substantielles d’Aristote.

  1. De la tragédie d’Alzire. (Cl.)
  2. Voyez la note sur la lettre 388.