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CORRESPONDANCE.

moi espérer que l’absence ne m’aura point entièrement effacé dans votre idée, et que je pourrai retrouver dans votre cœur une pitié pour mes malheurs qui du moins ressemblera à l’amitié,

La plupart des femmes ne connaissent que les passions ou l’indolence ; mais je crois vous connaître assez pour espérer de vous de l’amitié.

Je pourrai bien revenir à Londres incessamment, et m’y fixer. Je ne l’ai encore vu qu’en passant. Si, à mon arrivée, j’y trouve une lettre de vous, je m’imagine que j’y passerai l’hiver avec plaisir, si pourtant ce mot de plaisir est fait pour être prononcé par un malheureux comme moi. C’était à ma sœur à vivre, et à moi à mourir : c’est une méprise de la destinée. Je suis douloureusement affligé de sa perte : vous connaissez mon cœur, vous savez que j’avais de l’amitié pour elle. Je croyais bien que ce serait elle qui porterait le deuil de moi. Hélas ! madame, je suis plus mort qu’elle pour le monde, et peut-être pour vous. Ressouvenez-vous du moins que j’ai vécu avec vous. Oubliez tout de moi, hors les moments où vous m’avez assuré que vous me conserveriez toujours de l’amitié. Mettez ceux où j’ai pu vous mécontenter au nombre de mes malheurs, et aimez-moi par générosité si vous ne pouvez plus m’aimer par goût.

Mon adresse : chez milord Bolingbroke, à Londres.



168. — À M. ***[1].

1726.

Dear sir, I received lately two letters of your’s one directed to lord Peterborough's and the other to lord Bolingbroke’s : both happening to be in the country just whilst I was in town, hindered me from receiving your orders so soon as I should, and as I wished. I have sent this morning by the packet-boat, a bundle of three copies of the Henriade, with your direction upon it, to be conveyed to you by the means of M. Dunoquet, who lives at Calais, and who will take care of sending them to you by the public coach. If they are left at the custom-house, at Paris, you may claim them, and they will be delivered to you : but I hope proper care shall be taken of conveying them to your lodgings without giving you the trouble of asking for them.

One of the books is for Tiriot, though he bas utterly forgot me, and does not write one single word either in French or in English.

  1. Pièces inédites de Voltaire, 1820. — Cette lettre est probablement adressée à M. Dussol, dont il est question dans le premier alinéa de la lettre suivante.