Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome33.djvu/108

Cette page a été validée par deux contributeurs.
90
CORRESPONDANCE.

celles-là sont les plus belles, et ils m’ont assuré que les défauts que je trouvais étaient autant de beautés.

Je vous prie d’avancer toujours notre ouvrage, et d’effacer dans le neuvième chant ces deux vers :

Siège affreux, composé de ministres cruels,
Et toujours arrosé par le sang des mortels.

Il faudra les passer comme bien d’autres : cela n’en sera que mieux. J’ai la fièvre au moment que je vous écris. Le lait que j’ai voulu continuer, avec l’embarras des affaires et le chagrin dont je suis lutiné à Paris, m’a fait beaucoup de mal ; le pis que j’y trouve, c’est que cela retarde mon retour et me fait rester malgré moi dans une ville que je déteste. M. de Richelieu partit hier pour Forges, et milord Bolingbroke pour l’Angleterre ; ainsi je ne sais plus que devenir dans Paris. Mandez-moi au juste où l’on est de l’édition, et surtout ne me cachez point l’indiscrétion que vous avez eue de montrer la parodie à Mme de Bernières.



85. — À M. THIERIOT[1].

Ce samedi.

Je viens de recevoir ce que vous savez[2]. Effectivement, cela n’est pas trop bon ; mais on pourrait le rendre passablement plaisant en y travaillant un peu ; j’y songerai à mes heures de loisir. À l’égard du petit imprimé dont je vous ai parlé, je vous le porterai à la Rivière. Je ne compte revenir vous voir que lorsque j’aurai attrapé quelque chose des Pâris pour vous. Je vous suis extrêmement obligé de l’argent que vous avez donné à Viret[3] ; s’il faut le rendre avant mon retour, vous n’avez qu’à me dire sur qui il faudra tirer une lettre de change à Paris.

Je viens de lire les nouveaux ouvrages de Rousseau : cela est au-dessous de Gacon[4].



86. — À M. DE CIDEVILLES[5].

Paris, juin.

Quelque bonne que pût être la traduction anglaise, elle m’aurait assurément fait moins de plaisir que votre lettre. J’ai presque

  1. Éditeurs, de Cayrol et François.
  2. Sans doute une parodie d’Inès. (G. A.)
  3. Qui imprimait secrètement la Henriade à Rouen.
  4. Mauvais poète satirique.
  5. Pierre-Robert Le Cornier de Cideville, né à Rouen, le 2 septembre 1693, fut