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294 REMARQUES SUR PULGIIÉRIE.

connaître? De plus, cette Pulchérie ne fait que répéter ce que Viriate a dit dans la tragédie de Sertonus 1 .

Ce ne sont pas les sens que mon amour consulte; Il liait des passions l'impétueux tumulte.

Il y a des beautés de pure déclamation, il y a des beautés de sentiment, qui sont les véritables. Cette pièce tombe dans le même inconvénient qtfOthon. Trois personnes se disputent la main de la nièce d'Othon ; et ici on voit trois prétendants à Pul- chérie, nulle grande intrigue, nul événement considérable, pas un seul personnage auquel on s'intéresse. Il y a quelques beaux vers dans Othon, et ce mérite manque à Pulchérie. On y parle d'amour de manière à dégoûter de cette passion, s'il était pos- sible. Pourquoi Corneille s'obstinait-il à traiter l'amour? Sa comédie héroïque de Tite et Bérénice devait lui apprendre que ce n'était pas à lui de faire parler des amants, ou plutôt qu'il ne devait plus travailler pour le théâtre isolve senescentem-. Il veut de l'amour dans toutes ses pièces ; et, depuis Polyeuctc, ce ne sont que des contrats de mariage, où l'on stipule pendant cinq actes les intérêts des parties, ou des raisonnements alambiqués sur le devoir des vrais amants. A l'égard du style, tandis qu'il se perfectionnait tous les jours en France, Corneille le gâtait de jour en jour. C'est, dès la première scène, Yhabituàe à régner, et l'horreur d'en déchoir, c'est un penchant flatteur qui fait des assu- rances, ce sont des hauts faits qui portent à grands pas à l'empire.

C'est un vieux Martian qui conte ses amours à sa fille Justine, et qui lui dit : Allons, parle aussi des tiens; c'est mon tour d'écouter. La bonne Justine lui dit comment elle est tombée amoureuse et comment son imprudente ardeur, prête à s' évaporer, respecte sa pudeur.

On parle toujours d'amour à la Pulchérie, âgée de cinquante ans. Elle aime un prince nommé Léon, et elle prie une fille de sa cour de faire l'amour à ce Léon, afin qu'elle, impératrice, puisse s'en détacher.

Qu'il est fort cet amour ! Sauve-m'en si tu peux.

Vois Léon, parle-lui, dérobe-moi ses vœux.

M'en faire un prompt larcin, c'est me rendre service.

De tels vers sont d'une mauvaise comédie, et de tels senti- ments ne sont pas d'une tragédie.

1. Acte II, scène i r,: .

2. Horace, livre I er , épltre i re , vers 8.

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